Balades Romantiques
Vous souhaitez réagir à ce message ? Créez un compte en quelques clics ou connectez-vous pour continuer.



 
AccueilAccueil  PortailPortail  RechercherRechercher  Dernières imagesDernières images  S'enregistrerS'enregistrer  Connexion  
Le deal à ne pas rater :
Pokémon EV06 : où acheter le Bundle Lot 6 Boosters Mascarade ...
Voir le deal

 

 Comme une rose broyée entre ses mains

Aller en bas 
AuteurMessage
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyMar 8 Nov - 22:45

COMME UNE ROSE BROYÉE ENTRE SES MAINS


Chapitre I


Oscar avait donc pris sa décision, elle se marierait. A vrai dire, elle était persuadée qu'aucun homme ne ferait sa demande. Qui était assez fou, à la Cour, pour vouloir épouser une femme-soldat ? Oscar était bien loin d'incarner l'image de l'épouse docile ! Oui, pas de prétendant, pas de mariage, et tout redeviendrait comme avant. Mais en cela elle se trompait. Plusieurs gentilshommes demandèrent sa main, et le plus empressé d'entre eux était Victor-Clément de Girodelle.
- Oh, Seigneur, que faire ? se lamentait-elle en contemplant la tasse
de chocolat qu'André venait de lui apporter.
Une certaine panique s'emparait d'elle. Maintenant que ces gentilshommes avaient fait leur demande, elle n'avait aucune raison
de se dérober, elle devait choisir, faute de quoi le roi s'en chargerait
à sa place. Et Dieu sait quel homme il comptait lui faire épouser si
jamais elle n'avait pas choisi avant la fin du délai ! Se vengerait-il au
point de désigner quelque individu repoussant ? Oscar frissonna.
- Oscar, tu as froid ? demanda André.
- Non, je vais bien, je t'assure.
- Ne me mens pas, Oscar, je te connais bien, peut-être même
plus que tu ne te connais toi-même. Je sais quand tu es malheureuse.
Elle se tourna brusquement vers lui. Elle lut la tristesse, la détresse
peut-être, dans les yeux verts de son ami. Mais pas un instant elle
n'imagina qu'il souffrait parce qu'il l'aimait, qu'il n'osait pas faire sa
demande à son tour. Elle crut qu'il redoutait ce mariage parce que
cela signifierait que plus jamais ils ne pourraient ferrailler tous les deux
comme avant, que plus jamais ils ne feraient de longues promenades à
cheval, que peut-être son époux ne voudrait pas qu'il reste auprès d'elle.
Comment aurait-elle pu imaginer l'amour qui rongeait le coeur d'André ?
Il cachait si bien ses sentiments. Souvent, il jetait sur elle un regard triste, surtout lorsque la jeune femme se trouvait en compagnie de Fersen, mais elle avait toujours cru que c'était de la compassion pour son état de femme-soldat qui aurait dû la priver de connaître l'amour. André était son ami d'enfance, son frère. Et on ne pouvait épouser son frère, aussi l'idée qu'André puisse l'aimer ne l'avait pas seulement effleurée.
- Que faire ? murmura-t-elle.

Pendant ce temps, à Versailles, le roi se lamentait aussi. Il avait
entrepris de préparer l'itinéraire pour la chasse du lendemain, mais
il ne parvenait pas à se concentrer. C'était ainsi depuis qu'il avait
ordonné à Oscar de faire ce choix. Il écoutait ses ministres d'une
oreille distraite, et cette histoire le préoccupait au point qu'il en perdait
presque le sommeil, mais fort heureusement pas l'appétit. Louis XVI
avait cru que faire d'Oscar sa maîtresse était une idée de génie, d'autant
plus qu'il s'agissait en fait d'une apparence qu'il voulait donner à toute
la Cour. Il savait que les courtisans se moquait de lui tout bas et le
comparait à son grand-père. Il n'avait donc rien trouvé d emieux que
ce stratagème qui devait lui obtenir une forme de respect. Mais il n'était
pas question qu'Oscar soit sa maîtresse autrement que de nom ! Il avait
toujours désapprouvé la conduite de son grand-père avec la du Barry,
et de plus il était fort épris de Marie-Antoinette. Non, ce ne devait être
qu'une façade, et il n'avait même pas encore décidé si la reine serait
mise au courant. Seulement, voilà : il ne l'avait pas dit à Oscar, elle ne
lui en avait pas laissé le temps. Et après l'affront qu'elle lui avait fait
subir, il n'avait eu d'autre choix que de persister dans idée même si la
vie d'Oscar allait être complétement bouleversée. Il ne pouvait plus
reculer...

Le comte Victor-Clément de Girodelle faisait à Oscar une cour assidue. Et lorsqu'il ne se présentait pas lui-même au château Jarjayes, il lui faisait porter mille friandises, mille cadeaux, des roses chaque jour plus belles accompagnées de billets doux. parfois, les vers de mirliton de Girodelle amusaient Oscar, mais le plus souvent elle donnait aussitôt les cadeaux à Grand-mère. Le général de Jarjayes avait été très heureux lorsque le comte lui avait demandé la main de "mademoiselle votre fille". Et dire qu'il avait voulu faire d'elle un garçon !
- Ma petite Oscar, dit Grand-mère, monsieur de Girodelle demande la permission de te visiter.
- Et bien, soit, plus vite il viendra, plus vite il partira !
Au même moment, Girodelle avait une latercation avec André. les
deux hommes avaient toujours été en bon terme, mais depuis que
Girodelle faisait la cour à Oscar il traitait André en domestique, comme
s'il avait compris quels sentiments animaient le jeune homme.
- André, occupe-toi de mon cheval ! avait-il crié.
Et André avait fort mal pris le ton qu'avait employé le comte. L'arrivée
d'Oscar interrompit la dispute. Elle était resplendissante dans sa robe
cramoisie. Il lui avait fallu du temps pour s'habituer au corset, mais elle n'y faisait plus guère attention ; elle avait d'autres soucis.
- Mademoiselle de Jarjayes ! s'écria le comte en s'inclinant, oubliant
jusqu'à l'existence d'André qui ne perdait pas une miette de la scène.
Oscar daigna accepter son bras, et ils firent quelques pas dans le parc.
Ecoeuré, André les regarda s'éloigner. "Oh, Oscar, tu ne vois pas que je
t'aime ? Si seulement j'avais assez de courage pour t'avouer mes
sentiments !"
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyVen 11 Nov - 0:04

Chapitre II


Louis XVI faisait les cent pas dans son Il s'était laissé entendre qu'Oscar avait refusé tous les prétendants. Qui allait-il choisir ? Soudain, tout devint clair dans son esprit. Il se souvenait que son grand-père voulait le comte de Girodelle à la tête de la Garde royale, et Oscar devrait bientôt rendre son épée. Pourquoi ne pas nommer ce Girodelle colonel ? Et ce serait là gratification pour accepter d'épouser Oscar ! Comme tout était simple, tous les éléments s'enchaînaient à merveille. Satisfait, le roi se frotta les mains. Tout allait bien, maintenant, et ce fut tout guilleret qu'il partit à la forge.

Pour Oscar, tout était loin d'être réglé. Au fond de son coeur, il y
avait un homme qu'elle souhaitait épouser. Mais cet homme n'était
pas là, il était bien loin, et elle ignorait même s'il était encore en vie.
Cela faisait trois ans déjà que le comte Hans-Axel de Fersen était
parti se battre aux Amériques pour ne pas compromettre davantage
la reine. Bien sûr, il aurait pu rentrer en Suède, et d'ailleurs son père
était furieux contre lui : il devait passer six mois par an en Suède ou
partout où il plairait au roi Gustav III d'aller, quitte à passer les six
autres mois où bon lui chante (à Versailles, par exemple), mais surtout
Fredrik-Axel voulait que son fils rentre en Suède avec une épouse.
Et voilà qu'il partait aux Amériques ! C'est que la Suède était encore
trop près de Versailles pour ce voyageur infatigable, et il devait
s'éloigner le plus possible pour ne pas être tenté de revenir plus tôt.
"Je vais mettre des mers, des océans entre elle et moi", avait-il dit.
Et quoi de mieux qu'une guerre pour rester bloqué au loin ? Oui,
Oscar rêvait d'épouser Hans-Axel, mais jamais elle ne pourrait être
sa femme. Lorsqu'il était en France, elle avait dû se présenter à lui
sous son enveloppe de soldat, et maintenant qu'elle devait choisir un
époux il était à l'autre bout du monde. "Allons, renonce à ton rêve
absurde", se disait-elle, "même si Fersen était là il ne demanderait pas
ta main. C'est la reine qu'il aime et personne d'autre. Pourquoi se bercer
d'illusions ?" Et quand bien même Oscar aurait demandé au roi un délai
supplémentaire pour épouser Fersen, elle ne ferait que gagner un peu
de temps. Le roi n'était pas disposé à attendre des années, il voulait
régler cette affaire au plus vite. Et qui sait si Fersen reviendrait un jour ?
Non, décidemment c'était une idée absurde...

André avait passé la nuit dans l'écurie comme chaque fois que son
coeur tourmenté se mettait à saigner. C'était aujourd'hui le dernier jour
pour Oscar. Si elle n'avait pas fait son choix, le roi désignerait lui-même
le mari. André, lui, avait choisi. Il allait fuir, fuir Oscar à qui il ne pouvait
donner son coeur. Il avait parlé au général. Oh bien sûr il ne lui avait
pas fait part de ses sentiments ! Il avait prétexté le prochain mariage
d'Oscar pour se retirer à Arras. Désormais, elle n'avait plus besoin
de lui, n'est-ce pas ? Le général y avait consenti :
- Je te souhaite de trouver le bonheur à ton tour, André.
Trouver le bonheur à son tour ? Alors qu'Oscar et lui étaient si
malheureux ? Que chacun souffrirait en silence sans connaître les
sentiments de l'autre ? Bouleversé, André courut s'enfermer dans l'écurie.
Il aperçut Girodelle au loin, et en fut encore plus irrité.

- Sachez, monsieur de Girodelle, que je consens à vous épouser,
dit Oscar d'une voix éteinte.
Elle avait dit cela sans le regarder, elle aurait voulu qu'une attaque
le terrasse sur le champ. Victor-Clément sourit et déposa un baiser
sur la main qu'elle lui tendait avec un soupçon de mauvaise volonté.
- Je promets de faire votre bonheur, dit-il, une joie indescriptible dans
les yeux. Maintenant, mademoiselle, si vous voulez m'excuser, ajouta-t-il
en s'inclinant, je dois vous laisser. J'ai des ordres à donner pour les
préparatifs de notre mariage. Sa majesté tient à ce qu'il ait lieu le plus
vite possible.
- Faites donc, monsieur.
Oscar avait fait semblant de ne pas voir que Girodelle portait son
tout nouvel uniforme de colonel, mais elle comprit qu'en acceptant
de l'épouser elle s'était également rangée à la volonté du roi.
Ivre de joie, Girodelle heurta Rosalie dans l'escalier. Il ne vit pas la
jeune fille le suivre du regard jusqu'à ce qu'il ne soit plus qu'un point
à l'horizon. "Oh, monsieur de Girodelle, vous ne voyez pas que je vous
aime ? Si seulement j'avais assez de courage pour vous avouer mes
sentiments !"

Le mariage eut lieu la semaine suivante. André avait disparu. Il était parti pour Arras silencieusement, en pleine nuit. "Adieu, Oscar, puisse-tu connaître un peu de bonheur !", avait-il murmuré en se tournant une dernière fois vers le château endormi. Puis il avait galopé sans relâche, s'imposant une fatigue physique qui devait lui faire oublier cette souffrance qui lui tordait le ventre.
Oscar était magnifique dans sa robe de mariée, mais elle était loin
d'être aussi rayonnante que s'imaginait Girodelle. Aveuglé par son
amour pour elle, Victor-Clément ne pouvait imaginer qu'elle ne fut pas
heureuse elle aussi. Le roi et la reine étaient présents à la cérémonie.
Ce caractère officiel mit Oscar mal à l'aise, elle se sentait prise au piège.
Et maintenant ? Qu'allait-elle devenir ?
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptySam 12 Nov - 3:42

Chapitre III


Oscar aurait voulu être n'importe où pourvu que ce ne fut pas
dans le carosse qui la conduisait à la demeure du comte de Girodelle, cet homme auquel désormais elle était mariée. Girodelle... Oscar avait beau se répéter ce nom, elle ne réalisait pas encore ce qui lui arrivait. Girodelle dont le bref contact l'avait révulsé lorsqu'il l'avait embrassée devant l'église, Girodelle qui n'avait dansé qu'avec elle, Girodelle qui ne lâchait plus sa main, à présent, Girodelle-Girodelle-Girodelle... "Madame, je me consumme d'amour pour vous..." avait-il dit. Elle n'avait pas répondu, et un silence oppressant avait pris place dans le carosse.
A peine Oscar entrait-elle dans la demeure q'un visage familier se
détacha parmi les domestiques venus saluer la nouvelle comtesse :
- Rosalie ! Mais...
- Cette jeune personne est venue tantôt me demander du travail.
Puisque vous la connaissiez, je l'ai engagé pour être votre femme de
chambre. Pour vous être agréable, madame, ajouta-t-il.
Rosalie fit la révérence.
- Soyez la bienvenue, madame la comtesse.
- Non, Rosalie, je t'en pris, pour toi je suis Oscar, c'est tout.
- C'est un point que j'aimerais éclaircir, dit Girodelle. Votre condition
n'est plus la même, à présent, ma chère amie, n'oubliez pas que vous êtes comtesse de Girodelle. Vous serez Françoise, désormais.
Un coup de poignard n'aurait pas davantage blessé Oscar.
- Comment ?!
- Oui, mon amie. J'en ai décidé ainsi.
Le comte ignora le regard meurtrier que lui lança Oscar.
- Rosalie, montrez à madame la comtesse ses appartements.
Puis il déposa un baiser sur la main d'une Oscar figée de colère.
- Je vous rejoins dans quelques instants, ma chère Françoise, ne vous
inquiétez pas.
Comment ?! Girodelle avait la prétention de lui prendre jusqu'à son
prénom ? Etait-il fou ? Et maintenant il exigeait ses droits d'époux ?
Ah non, alors ! N'était-ce pas un mariage dans le seul but d'échapper
au roi ? Fallait-il vraiment que ce soit un vrai mariage ? Certes, Oscar
n'aurait pas pensé la même chose avec Fersen, mais là c'était Girodelle !
Elle commençait à le voir de plus en plus comme un grand reptile gluant
avec ses paroles mielleuses, et cette idée la fit frissonner.

Lorsque Victor-Clément entra dans la chambre d'Oscar, il fut frappé par l'obscurité totale qui y régnait.
- Comment ? Pas même une chandelle, mon amie ?
Le comte s'approcha du lit en prenant garde à ne pas trébucher et se
pencha sur la forme qui y était allongée. Etendue sur le côté, Oscar
faisait semblant de dormir, tentant de maîtriser les battements de son
coeur lorsque Girodelle posa sa main sur son épaule. Un pesant silence
répondit aux douces paroles qu'il lui susurrait à l'oreille. Dépité, le comte
la lâcha, fit quelques pas, hésita, puis sortit enfin. "Je vais vous laisser
dormir, puisque vous êtes si lasse, dit-il. Je n'insiste pas." Oscar attendit
longtemps avant d'oser pousser un soupir de soulagement. Puis elle
songea à Rosalie. Tandis qu'elle l'aidait à revêtir sa chemise de nuit, Rosalie lui avait avoué son amour pour Girodelle. Cela aurait presque fait rire Oscar si la jeune fille n'avait pas ensuite proposé de prendre sa place
dans le lit : "si les chandelles sont éteintes, monsieur ne se rendra pas
compte que c'est moi". Comment Oscar aurait-elle pu accepter ? Rosalie
était si naïve, elle aurait certainement regretté son geste puisque Girodelle ne l'aimait pas. Elle avait fini par la convaincre, lui demandant de réfléchir à ce qu'elle éprouvait réellement pour le comte.

Quelques jours s'écoulèrent. Girodelle s'impatientait de plus en plus. Chaque nuit il empruntait la porte de communication qui reliait les
appartements du comte et de la comtesse, et chaque nuit il trouvait
"Françoise" endormie. Ou tout au moins le prétendait-elle. Lorsqu'il
s'en plaignait au matin, elle prétextait toujours une lassitude imaginaire.
Oui, il en était sûr : son épouse inventait n'importe quoi pour se dérober
à ses devoirs. "Palsembleu ! Je n'en tolérerai pas davantage !". Le comte
se rua vers les appartements d'Oscar, de très bonne heure, cette fois.
- Françoise, mon amie, je vois que beaucoup de repos et de grand air
vous a fait du bien. Rosalie, laissez-nous seuls.
L'intrusion du comte avait fait sursauter Oscar et troublée Rosalie qui
brossait ses magnifiques cheveux blonds. Lorsque cette dernière sortit,
la jeune femme lutta pour ne pas s'évanouir. Seule avec Girodelle !
Girodelle qui était son époux ! Elle comprit qu'elle n'avait fait que gagner
du temps, repousser le moment fatidique. Victor-Clément s'approcha
et ses lèvres minces s'étirèrent en un sourire qui ne laissat présager rien
de bon. Soudain, le comte enleva ses cheveux et les plaça sur le buste
qui ornait la cheminée. Le voir ainsi sans les longues boucles qui
encadraient habituellement son visage acheva de paralyser Oscar.
Elle ferma les yeux, s'efforçant de songer à Fersen tandis que
Victor-Clément dénouait les lacets de son corset...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyLun 14 Nov - 2:18

Chapitre IV


Les mois passèrent. Déjà, Girodelle déchantait. Il avait
passionnement aimé Oscar, mais il s'était rapidement lassé de la mauvaise volonté de la jeune femme. Jamais il n'aurait dû l'épouser. Son amour l'avait aveuglé au point de penser que puisqu'il l'aimait elle l'aimait aussi, et maintenant il se reprochait amèrement son erreur. Les scènes de ménage étaient continuelles. Girodelle s'était aperçu à ses dépens qu'Oscar était toujours le colonel qu'il avait connu autrefois, et Oscar de son côté avait découvert combien le comte pouvait être tyranique. Leurs affrontements étaient une suite logique à l'emportement et à l'orgueil de chacun. Rosalie était triste. Girodelle l'ignorait, ne faisait jamais attention à elle, et plus elle voyait combien Oscar était malheureuse plus elle avait honte d'être amoureuse de lui. Que n'avait-elle suivi André à Arras ! Ils auraient pu avoir une vie saine et heureuse là-bas ! Mais André non plus ne l'aimait pas, il était un ami, un frère, mais son coeur était pour Oscar. Girodelle passait le plus clair de son temps à Versailles, accomplissant avec un zèle tout particulier son devoir de colonel de la Garde royale. Il n'aimait pas les bals et il fallait que Marie-Antoinette insiste pour qu'Oscar et lui se rendent à la Cour. La reine avait du mal à s'habituer à sa présence. Au début, elle se trompait toujours et appelait le "colonel de Jarjayes". Oscar lui manquait, elle n'avait pas de nouvelles de Fersen : toute la journée, Girodelle faisait les frais de l'humeur maussade de sa majesté. La seule joie d'Oscar était les promenades à cheval qu'elle faisait en compagnie de Rosalie. Au début de leur mariage, Girodelle lui avait interdit (il avait osé !) ses sorties craignant les conséquences d'une chute si jamais elle portait un enfant, mais depuis qu'il s'était désintéressé d'elle il n'avait plus abordé le sujet et Oscar en profitait. C'était là le peu de liberté qui lui restait, sa seule raison de vivre. "Oh, André, si tu savais à quel point tu me manques ! Pourquoi es-tu parti si vite ? Je ne peux même pas te voir !".

André n'était pas revenu depuis le mariage d'Oscar. Il travaillait sur les terres des Jarjayes à Arras. Il était seul, il ne rêvait que d'Oscar, n'osant imaginer quelle pouvait être sa vie à présent. Rosalie lui avait écrit quelques jours auparavent. Les nouvelles étaient bien tristes. "Pauvre Oscar, comme tu dois être malheureuse avec Girodelle ! Vous n'étiez vraiment pas fait l'un pour l'autre. Et moi qui t'aime de tout mon coeur je suis indigne de toi. Et toi, Rosalie, tu n'es guère heureuse non plus. Oh, Rosalie, si tu avais voulu tu aurais pu venir avec moi, nous aurions pu mêler nos larmes en regardant le vent emporter les feuilles mortes de nos coeurs meurtris." André se mit en route. Il y avait bien longtemps qu'il n'avait vu sa grand-mère. En chemin, il se fit cette promesse : "Si jamais je rencontre Oscar je lui dirais tout, tout ce que je ressens pour elle, et peu importe ce qu'il adviendra de moi !" Fort de sa résolution, le jeune homme prit la route du château Jarjayes.

Les promenades qu'Oscar et Rosalie faisaient les conduisaient la plupart du temps sur la route de Versailles et au château Jarjayes. Devant le général et sa mère, elle affectait d'être heureuse, mais Nanny savait tout de la tristesse de sa "petite Oscar". Puis la promenade reprenait, toutes deux s'efforçant de rentrer avant le retour de Girodelle. Pour se changer les idées, elles bavardaient de choses futiles, mais rapidement le passé s'imposait à elles à travers les souvenirs. Parfois, elles chevauchaient en silence. Oscar pensait à André, mais de plus en plus souvent au comte de Fersen. Elle tentait d'imaginer quelle vie aurait été la sienne si elle avait pu l'épouser. Tout à sa reine, il l'aurait sans doute négligée, mais qui sait ... ? Etre négligée par Fersen ne valait-il pas mieux que d'être convoitée par Girodelle ? Mais étant à présent négligée par Girodelle, Oscar se demandait si ... Mais ... !! Oscar fut interrompue par le pas d'un cheval tout près d'elle. Rosalie ? Non, cela ne
se peut, Rosalie était partie devant. Oscar se retourna, le souffle coupé par l'émotion :
- Monsieur de Fersen ! C'est bien vous ?
L'homme descendit de cheval. Un large sourire sur son si beau visage, il ôta son tricorne.
Folle de joie, Oscar se jetta dans ses bras, pleurant et riant à la fois.
- Je savais qe vous reviendriez ! Oh, monsieur de Fersen !
Alors, comme dans un rêve, Hans-Axel la serra tout contre lui.
- C'est pour vous que je suis revenu, Oscar...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyMar 15 Nov - 2:55

Chapitre V


- Comment ! Non, ce n'est pas possible ... !
Oscar et Hans-Axel s'étaient assis au bord de la petite rivière qui serpentait en contre-bas de la route. Pressé de questions, il avait fait un rapide récit de son équipée aux Amériques : Philadelphie, la prise de Yorktown, et la fièvre qui avait failli l'emporer. Il ne parla pas de la reine. Insistant à son tour pour qu'Oscar lui donne de ses nouvelles, il avait appris qu'elle était désormais madame de Girodelle et qu'elle en souffrait. Elle ne parla pas d'André.
- Hélas, monsieur de Fersen, beaucoup de choses ont changé en votre
absence.
Ils restèrent un moment silencieux. Soudain, le vent se mit à souffler,
indifférent à tout ce que ces deux coeurs brisés ressentaient.
- Je ne suis revenu que dans l'espoir de vous voir, Oscar. Je ne sais
comment vous dire cela, mais je crois que mon amour pour sa majesté
n'est plus aussi fort, mon départ peut-il seulement expliquer cela ? Je ne
me suis pas encore rendu à Versailles et je ne sais pas si je le ferai, mais
je tenais à vous voir avant de rentrer en Suède.
Oscar gardait la tête baissée, comme absorbée dans l'examen du brin
d'herbe qu'elle tenait entre ses mains.
- Vous ne dites mot ? Je comprends, ma chère Oscar, je ne sais pas
moi-même ce que j'éprouve encore pour la reine et ce que j'éprouve
pour vous.
- Et que pourrais-je vous dire, monsieur de Fersen, moi qui toujours
a été le témoin silencieux de vos amours, moi qui vous aime tant mais
ne pouvait le dire, moi que mon destin contraignait à me conduire en
homme, à aimer sans aucun espoir d'être aimée !
Des sanglots étaient perceptibles dans sa voix. Oscar était résolue à
aller jusqu'au bout.
- Et lorsque l'on me rendit ma véritable nature vous n'étiez pas là. J'ai
caressé l'espoir d'être un jour votre femme, oui, malgré l'amour que vous
portiez à sa majesté, et je suis aujourd'hui prisonnière de Girodelle comme je l'étais autrefois de mon uniforme de ...
Avant qu'elle ne puisse en dire davantage, Hans-Axel se pencha vers elle
et essuya délicatement du bout des doigts les larmes trop longtemps contenues qui ruisselaient sur ses joues. Incapable de la moindre réaction tant l'émotion la submergeait, Oscar vit qu'il ne tenait plus qu'à quelques centimètres de son visage. Le comte l'enlaça tendrement et captura ses lèvres en un baiser, un baiser que la jeune femme aurait voulu voir durer à jamais ...

Deux jours plus tard, sous prétexte de chevaucher avec Rosalie, Oscar se rendit à l'hôtel particulier du comte de Fersen. Lorsqu'elle le vit, elle laissa glisser la capuche de sa cape bleue-nuit, libérant sa magnifique chevelure dorée.
- Madame, vous êtes chaque jour plus charmante, dit-il en s'inclinant pour déposer
un baiser sur sa main gantée.
Oscar était un peu gênée. Pourquoi était-elle venue ? Elle ne saurait le dire. Tout en rougissant de sa hardiesse, elle ne put retenir les mots qui franchirent tout naturellement le seuil de ses lèvres nacrées :
- Je serais très heureuse de poursuivre notre conversation ... où nous l'avions laissée ...
Fersen sourit. Doucement, il lui ôta un gant pour déposer un baiser dans le creux de la paume de la jeune femme. Oscar ne l'en empêcha pas, bien au contraire, et très vite le second gant tombait sur le sol.
- Vous vouliez poursuivre notre conversation ? Je crois que nous en étions resté là, ajouta-t-il comme il capturait ses lèvres.
Elle crut vivre un rêve ... Les lèvres de Fersen sur les siennes ... Non, ce
n'était pas possible, tout était trop beau pour être vrai ... Et si seulement elle pouvait rester prisonnière de ce rêve ! S'accrochant à Hans, elle s'abandonna totalement. Déjà, le comte avait dénoué les rubans qui fermaient la cape. Elle fut à terre dans un murmure de soie, découvrant une robe à paniers du même ton. le coeur d'Oscar battait très vite, à présent, tendant le corsage orné de fleurs délicates. Les mains de Hans enserraient sa taille tandis qu'il éparpillait mille baisers dans son cou. Comme la reine et Girodelle étaient lon, dans cet instant magique ! Très vite, le gentilhomme suédois la souleva dans ses bras et l'emporta,
traversant plusieurs pièces, avant de la déposer enfin sur le grand lit à baldaquin. La robe d'Oscar, toute froissée, fut dégraffée, son corset délacé. Il n'existait plus rien au monde que le bonheur indescriptible d'Oscar dans les bras d'Hans-Axel, aggripée à ses larges épaules ...

De nouveau, les jours, les semaines, même, passèrent. Oscar était rayonnante, elle avait goût à tout, la vie lui semblait belle. Girodelle avait bien remarqué que son épouse était plus joyeuse depuis quelque temps, que ses joues étaient plus colorées, mais il n'y avait guère prêté attention. Elle devait avoir compris quel bonheur, quel honneur, était le sien d'être comtesse de Girodelle, voilà tout. Victor-Clément n'était du reste pas souvent chez lui. La reine faisait exprès de le retenir pour rien : "Colonel de Girodelle !" - "Que désire sa majesté ?" - "Rien, je voulais juste voir si vous étiez là !". Bien sûr, il savait que Fersen était de retour des Amériques, mais outre le fait qu'Oscar le connaissait, il n'avait pas fait le rapprochement entre ce retour et le changement d'humeur de la jeune femme. Et pourtant, changement, il y avait. Oscar se rendait
très régulièrement chez son amant suédois. Leurs ébats passionnés l'avait métamorphosée dans tous les sens du terme. La jeune femme, en effet, attendait un enfant de Hans. Elle le lui dit, il fut très heureux, quoique inquiet quant à la réaction de Girodelle quand il s'en apercevrait. Il lui annonça qu'ils ne pourraient plus se voir aussi souvent : pour le forcer à reparaître à Versailles, la reine lui avait fait attribuer un régiment, le Royal-Suédois. Sa majesté ignorait tout des visites d'Oscar, mais elle ne supportait pas de savoir Fersen de retour et si loin d'elle. C'était à peine s'il était venu la saluer. Marie-Antoinette était furieuse, comment osait-il l'abandonner ? Hans contemplait Oscar lovée tout contre lui. Ainsi, il était le père du bébé ... Si seulement Girodelle n'existait pas ... Soudain, un bruit sourd se fit entendre au-dehors ... Le comte mit rapidement ses culottes, ouvrit la fenêtre qui donnait sur le jardin et se pencha, cherchant la provenance de ce qui ressemblait à la chute d'un corps. "Rien, c'est étrange ..." En bas, dans le jardin, l'homme se releva, sortit de sa cachette, et prit la fuite ...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyLun 21 Nov - 12:01

Chapitre VI


Mathurin se frottait les mains. Quelle belle découverte il avait
fait ! Il allait enfin pouvoir causer du tort à cette comtesse qu'il
haïssait. Cela faisait maintenant 10 ans qu'il était le valet du comte
de Girodelle, et ce dernier l'avait toujours traité en confident. Puis
cette femme avait fait intrusion dans sa vie. Cette satanée comtesse
était la personne la plus têtue qu'il eut jamais vu. Dès son arrivée,
elle avait tout mis sans dessus dessous, bouleversé l'ordre des
choses, et exasperé le comte. Et lui, Mathurin, subissait les mouvements
d'humeur de Girodelle qui à présent s'impatientait et s'emportait pour
un rien. A cause de cette femme ! Alors Mathurin avait espéré trouver
quelque scandale dans sa conduite, de quoi la discréditer définitivement
aux yeux de tous. Il avait bien fait remarquer à monsieur le comte que
madame la comtesse montait chaque jour à califourchon dans des
culottes masculines, mais il avait répondu que ce n'était là que fantaisie
de sa part et qu'il n'y voyait nulle malice. Puis Mathurin avait remarqué
que la comtesse se promenait maintenant en carosse, la capuche de la
cape qu'elle jetait sur ses robes rabattue sur son visage. Un carosse
conduit par Rosalie. N'était-ce pas étrange ? Il les avait un jour suivies
mais il avait fini par perdre leur trace aux portes de Paris. Craignant de
ne jamais savoir le fin mot de l'histoire, il avait fait part de ses soupçons
à Lisette, sa bonne amie. Le sort s'en mêla. La fille avait une place de soubrette chez le comte de Fersen. Mathurin ne parlait-il pas de cette femme qu'elle avait vu plusieurs fois entrer dans les appartements du comte ? Sûre d'elle, Lisette aida l'âme damnée de Girodelle à se glisser à l'arrière de la demeure. Il escalada la façade jusqu'au premier étage en veillant à ne pas faire de bruit et s'approcha de l'une des fenêtres de la chambre à coucher du comte de Fersen. Il avait tout vu : Hans-Axel ouvrir avec une habileté prodigieuse le corset de la jeune femme, Oscar délirer de plaisir entre ses bras... Il l'entendit lui avouer sa grossesse. Mathurin était si content qu'il finit par perdre l'équilibre et tomber.
C'était le bruit qui avait attiré l'attention du comte ... mais le voyeur avait eu le temps de se dissimuler ...

C'était bien le sixième objet que Girodelle brisait depuis qu'il savait. De rage, il avait renversé tout ce qui se trouvait sur son bureau, et tout le contenu de l'encrier maculait à présent le sol. Mais que devait-il faire ? Mathurin avait modestement suggéré qu'il répudie Oscar (alors le scandale serait énorme, ce que Victor-Clément voulait éviter) ou qu'il la fasse enfermer au couvent, mais Girodelle voulait châtier Fersen en premier. Il ne pouvait pas le provoquer en duel, il n'avait pas été témoin des faits. Et puis Fersen pouvait le vaincre. Non, et s'il le faisait assassiner ? Naturellement, une fois la chose faite, il se chargerait personnellement d'en informer Oscar ... Des rôdeurs pourraient
l'attaquer ... Cela lui semblait la meilleur solution ...
- Mathurin, serais-tu prêt à accomplir un petit travail pour moi ?
Un sourire en coin, son âme damnée prit la bourse de pièces d'or qu'il lui
tendait.
- Quand ? Où ? Comment ?
- Aucune importance, mais déguise-toi, ne porte pas ma livrée, met un
masque. Tu dis qu'il doit prendre le commandement de son régiment ?
La route de Versailles me semble un endroit approprié. Fais cela vite.
- Ce sera fait. Le comte de Fersen sera mort demain ...

Hans-Axel connaissait la route de Versailles par coeur. Il l'avait empruntée tant de fois, en carosse ou à cheval comme aujourd'hui. Comme toujours, plongé dans ses pensées. Il avait découvert qu'il aimait Oscar et que cet amour habitait la jeune femme depuis longtemps dans les replis secrets de son âme. Elle était mariée, et il l'avait fait tomber enceinte. Il pensa à la reine. Ne pouvait-il aimer que des femmes mariées ? Etait-ce parce qu'il hésitait à fonder un foyer ? Et si Oscar lui donnait un fils ? Et Girodelle, dans tout cela ? Et la reine ? Etait-il sûr de ne plus l'aimer ? Hans-Axel ne vit pas Mathurin lorsque celui-ci, portant cape sombre et masque, se jeta sur lui pour le faire tomber de cheval. Aussitôt, une douleur lancinante se fit ressentir. Avant qu'il n'ait pu réaliser ce qui se passait, Mathurin lui avait donné un rapide coup de poignard au ventre. Arrachant la lame effilée, il la plongea une seconde fois dans la plaie béante. Il répondit par un petit sourire aux râles de souffrance du comte.
- Et maintenant, le coup de grâce ! s'écria-t-il en prenant un mousquet qu'il pointa sur lui à bout portant.
Rassemblant ses dernières forces, Hans-Axel parvint à atteindre son épée après l'avoir extraite du fourreau. Elle transperça l'homme de part en part. Puis le comte sombra dans les ténèbres ... Girodelle sortit de sa cachette. Mathurin était mort ? Bah, cela valait mieux, après tout : pas de témoin. Il devrait faire disparaître le cadavre et engager un autre valet. Puis il s'approcha de Fersen. Du bout de la botte, il s'assura qu'il
était perdu. Girodelle savait qu'il vivait encore, mais pour combien de temps ? Il ne prenait pas grand risque à le laisser comme cela sans l'achever, les coups de couteau qu'il avait reçu lui semblait former une blessure fatale. Il était inerte. Tout au plus allait-il agoniser quelques heures ... A ces pensées, Girodelle éclata d'un long rire dément ...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptySam 26 Nov - 22:03

Chapitre VII


André était bien content de serrer sa grand-mère dans ses bras.
- C'est bon de rentrer chez soi !
Le jeune homme un peu gauche avait rapidement changé en
quelques mois. Les lourdes tâches qu'il s'était imposé pour tenter
d'oublier Oscar avaient développé sa musculature. De plus, il avait
coupé ses cheveux bruns qui bouclaient à présent librement. Il ne
voulait plus ressembler à un aristocrate.
Nanny lui apprit combien Oscar était malheureuse avec Girodelle.
Sans Rosalie pour la soutenir, elle serait si seule...
- Mais, ajouta-t-elle, ma petite Oscar nous rend visite moins
souvent depuis quelques temps, et elle a l'air plus heureuse. Je n'ai
pas pu savoir ce qui s'est passé, mais je suis persuadée qu'elle
attend un enfant.
Cette nouvelle avait beaucoup attristé André. Il prétexta la fatigue
du voyage pour s'isoler.
- Tu vas bien, mon pauvre André ? Tu es tout pâle !
- Je n'ai pas beaucoup dormi, grand-mère.
Et, pour achever de la convaincre :
- Tu sais, grand-mère, je n'ai trouvé nulle part cuisine aussi bonne
que la tienne !
En vérité, André n'alla pas se reposer. Il sella son cheval, le fit sortir
de la propriété le plus silencieusement possible, puis monta et partit
au triple galop. Allait-il voir Oscar ? Ce n'était pas une très bonne idée.
Rosalie, alors ? Elle devait savoir si Oscar était réellement enceinte. Et
puis alors ? "Tu deviens fou, André, tu oublies sans cesse qu'Oscar et
Girodelle sont mariés. Que vas-tu lui repprocher ?" André accélera
encore l'allure. A bride abattue. Sur la route de Versailles, comme
autrefois, mais seul aujourd'hui. Il avait pensé rencontrer Oscar mais
elle ne devait plus monter maintenant qu'elle était enceinte. Sa seule
chance de la voir était d'attendre sa visite au château Jarjayes. Soudain,
un magnifique cheval blanc tout affolé lui barra la route. André mit pied
à terre.
- Oooh, tout doux ! Mais il me semble t'avoir déjà vu quelque part...
Il réfléchit un instant tout en calmant l'animal qui hennissait pour attirer
son attention.
- Tu ressembles au cheval de Fersen... mais ce n'est pas possible...
ton maître est parti. Hé ! Qu'est-ce que tu fais ?!
Le cheval avait saisi le bas de sa veste entre ses mâchoires.
- Bon, tu veux me montrer quelque chose ?
André le suivit sur quelques mètres...

- Fersen ! s'écria-t-il, stupéfait.
Mais Hans-Axel ne l'entendit ni ne le vit. Il gisait dans l'herbe depuis
environ une demi-heure et il n'avait pas repris conscience. Juste à côté,
on pouvait encore voir une flaque de sang frais et des traces qui
s'enfonçaient dans l'herbe. En voyant le sang sur l'épée de Fersen, André
comprit qu'il avait eu le temps de tuer l'un de ses agresseurs que son
complice avait dû traîner pour l'emmener. André s'agenouilla auprès du comte. Il s'aperçut que son coeur battait encore, mais faiblement. Il lui arracha ses vêtements poisseux de sang qui avaient été lacérés par les coups de poignard. La blessure n'était pas belle à voir. Se débarrassant aussi de sa propre chemise, André utilisa tous ces bouts de tissu pour faire le bandage le plus serré qu'il put. Il fallait à tout prix arrêter le sang s'il voulait que Hans-Axel ait la plus petite chance de survivre. Et maintenant ? Le laisser là et courir chercher de l'aide ? Le hisser sur le cheval et le ramener au château Jarjayes ? Certainement pas. Les pas d'un cheval et des bruits de roues se firent alors entendre. "Dieu soit loué ! Rosalie !" C'était Rosalie en effet qui par chance venait à passer et qui plus est avec une petite charette. Oscar lui avait demandé certaines de ses affaires qui étaient restées au château Jarjayes.
- André ! Tu es de retour ?! Mais que fais-tu là, torse nu ? ajouta-t-elle
en rougissant.
Quelques secondes plus tard, elle contemplait Fersen.
- Donne-moi ton tablier et tes jupons, Rosalie, il faut faire d'autres
pansements.
Rosalie sanglotait. Pauvre Oscar !

A l'approche de la charette, grand-mère apparut sur le perron.
- Tu étais sorti, André ? Oh ! Mais ...
Ils transportèrent Fersen toujours inanimé au premier étage.
- Que l'on fasse quérir le médecin, vite !
Le barbier du général, passablement aviné, voulut voir.
- Ce qu'il lui faut, c'est une bonne saignée !
- Vous ne trouvez pas qu'il perd assez de sang ?
André assomma cet imbécile avec la poêle que tenait Nanny.
Le médecin arriva. Très longtemps après, il sortit de la chambre, son
tablier couvert de sang.
- Eh bien, docteur ?
- Cet homme est robuste, pas de doute, mais pour tout vous dire je ne
sais pas s'il vivra. Voyez s'il passe la nuit.
Rosalie fondit en larmes.
- Mon Dieu, André, il faut prévenir Oscar !
Il tressaillit en entendant ce nom.
- Prévenir Oscar ?
- Oh, André ! Oscar est enceinte de Fersen !
Le monde aurait pu s'écrouler à cet instant. pour André, c'était pire que
tout. Qu'Oscar ait un enfant, il commençait à l'accepter puisqu'on l'avait
mariée à Girodelle. Mais Fersen ! Fersen l'avait touchée, il avait osé !
André courut s'enfermer à l'écurie, regrettant de ne pas l'avoir laissé
agoniser au bord de la route...

Encore perplexe sur la mine livide et la fuite d'André lorsqu'elle lui avait dit pour Oscar et Fersen, Rosalie monta les escaliers conduisant aux
appartements de la jeune femme. Comment allait-elle lui dire que Fersen
risquait de décéder dans la nuit ? Avant qu'elle ne frappe à la porte,
Girodelle la devança avec un petit air inquiétant.
- Je souhaite parler à mon épouse, Rosalie, vous reviendrez plus tard.
La lueur qu'elle aperçut dans les yeux du comte ne lui disant rien qui vaille, Rosalie se glissa dans le petit cabinet attenant au boudoir où Oscar se reposait et colla son oreille à la porte...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyLun 28 Nov - 22:31

Chapitre VIII


Pelotonnée sur une méridienne en velours bleu, Oscar tournait et retournait le problème dans tous les sens. Déjà, son ventre commençait à s'arrondir et bientôt Girodelle comprendrait. Prétexter une grande fatigue pourtant non feinte pour se retirer seule au bord de la mer en Normandie ? Mais ensuite ? Dire que pendant ce séjour elle avait recueilli
un bébé abandonné ? Girodelle n'était pas idiot ! L'arrivée soudaine de ce dernier la fit tressaillir.
- Françoise, mon amie, je vous trouve bien pâle. Je me fais beaucoup de soucis pour vous.
Si seulement il pouvait partir au plus vite !
- Je suis lasse, en effet. Un séjour à la mer me ferait le plus grand bien.
Mais Girodelle ne l'écoutait pas.
- Je me trouvais auprès de sa majesté, ma mie, lorsque nous comprîmes que le comte de Fersen ne viendrait pas prendre le commandement du régiment que sa majesté lui avait accordé dans sa grande bonté. Tudieu ! Nous l'avons attendu des heures !
Pourquoi lui parlait-il de Fersen ? Oscar eut peur.
- Sa majesté était tout à la fois furieuse et inquiète. Puis un messager
est arrivé. Je crois qu'il s'agissait de l'un de vos anciens domestiques,
ma chère. Enfin, pour tout vous dire, le comte de Fersen est tombé
dans une embuscade. J'ai bien peur qu'il n'ait été trop tard pour le
sauver...
Les petits yeux de Victor-Clément scrutaient Oscar tandis qu'il parlait.
Plus morte que vive, la jeune femme soutint pourtant le regard de son
mari mais elle tremblait de tous ses membres. On avait tué Hans ?
Non ! Cela ne se peut ! Girodelle aura été mal informé ! Oscar eut
toutes les peines du monde à retenir ses larmes. L'air appitoyé du
comte lui sembla faux. Et si... si Girodelle en savait plus sur cette
embuscade ? Le châle dont elle s'était couverte s'ouvrit légèrement,
dévoilant un négligé qui ne cachait rien de ses premières rondeurs.
A la vue du ventre d'Oscar, Girodelle perdit son calme. Il parla sans
réfléchir. Imaginer son épouse dans les bras de Fersen le rendait fou.
Elle avait mérité d'en savoir plus sur les circonstances du décès
supposé de son amant. Il se consumait de fureur.
- Madame, j'ai bien peur que votre petit bâtard n'ait plus de père,
dit-il avec un mauvais sourire.
Le cri étouffé d'Oscar ne l'émut pas. Bien au contraire il persista
avec cruauté.
- Comment êtes-vous tombée si bas, madame ? Je suppose que la
reine vous a vanté les prouesses de son étalon suédois, vous avez
voulu vous rendre compte par vous-même, n'est-ce pas ?
La jeune femme luttait contre les nausées. Girodelle était devenu un
monstre !
- C'est ... c'est vous, articula-t-elle faiblement.
- Comme vous y allez, allons donc ! Mais ceci dit, j'étais présent.
Mathurin s'est occupé de lui, mais il a toujours été maladroit, je crois
que votre Fersen a souffert.
- Vous êtes un monstre, vous ...
- Eh bien quoi ? Voulez-vous que je sois décapité ? Il n'est pas sûr que
vous obteniez satisfaction, après tout c'est la parole d'une femme infidèle
contre la mienne. J'aurais pu faire pendre Mathurin pour vous faire plaisir
mais votre Suédois a eu le temps de le passer au fil de son épée.
Oscar n'avait pas la force de lui répondre. Le regard fixe, elle entendait
la voix de Girodelle mais elle était si loin ...
- Mais j'oublie que vous êtes enceinte, pardonnez-moi. Je m'en voudrais
si le choc vous faisait perdre votre enfant. Permettez que je me retire.
Rosalie s'était ruée comme une furie dans le boudoir, armée d'un chandelier. Tout se passa très vite. Elle empoigna les cheveux du comte pour pouvoir l'assommer (il était trop grand pour elle) mais la chevelure resta dans ses mains. Girodelle la frappa et ils roulèrent sur le sol jusqu'à ce que Rosalie parvienne à récupérer le chandelier et à l'assommer.
- Oscar ! dit-elle très vite, monsieur de Fersen est encore en vie, André
et moi l'avons trouvé et ramené au château. Vite, il faut fuir avant que
Girodelle ne revienne à lui !
Oscar parut retrouver ses esprits. Etait-il possible que Fersen vive ?
André était revenu ? Tout se bousculait dans sa tête.
- Allons-y, Rosalie, je ne peux pas rester ici.
Rosalie l'aida à s'habiller et à monter en carosse. Deux choses seules
importaient : que Fersen et l'enfant vivent.

A peine arrivée, Oscar s'était précipitée au chevet de Fersen. Elle avait posé sa main sur son bras et lui avait parlé doucement pendant des
heures. Rosalie la suppliait de prendre un peu de repos mais elle s'y
refusait.
- Au fait, Rosalie, ne m'as-tu pas dit qu'André était revenu ? Où est-il ?
Je ne le vois nulle part !
Rosalie se souvint qu'il s'était enfermé dans l'écurie. Elle ne voulut pas
le lui dire.
- Oh, il a dû aller se coucher, je suppose, il est très tard. Je lui avais dit
que je veillerais sur monsieur de Fersen à mon retour.
- Oui, tu as sans doute raison ... Et père ?
- Le général s'est absenté avec votre mère. Il a eu l'envie subite de
passer un mois en Normandie.
- Grand bien leur fasse ...
Ce départ arrangeait Oscar. Elle craignait qu'à son réveil Girodelle ne
vienne faire une scène.

L'aube fut là très vite. La prmeière chose qui s'imposa à lui lorsqu'il reprit enfin conscience fut la douleur qui lui tenaillait le ventre et le flanc. Il se souvint confusemment de ce qui lui était arrivé mais il ne
savait pas où il était. Puis, se redressant péniblement dans le lit, il
reconnut oscar et Rosalie, toutes deux endormies à son chevet.
Comme si elle avait senti ses yeux posés sur elle, Oscar se réveilla.
- Hans-Axel ! Vous êtes de retour parmi les vivants !!
André, venu voir si Fersen avait passé la nuit, s'arrêta au seuil de la porte.
Oscar et Fersen... Fersen caressant tendrement le ventre d'Oscar ... André comprit qu'il n'avait aucune chance, inutile de gâcher leur bonheur. Sans un bruit, il sortit sans que personne ne l'ait remarqué.
Le médecin vint comme promis. Il avoua qu'il pensait devoir constater le
décès du comte mais fort heureusement ce fut pour annoncer à Oscar que sa vie n'était plus en danger.
- Changez donc ses bandages, la nature fera le reste.
- Oscar, je vais le faire, dit Rosalie. Allez donc vous allonger.
- Suivez donc les conseils de Rosalie, mon amie. N'oubliez pas que vous
êtes enceinte.
- C'est entendu ... Je vous verrai plus tard, Hans-Axel. Reprenez des
forces, vous aussi.

- Tu es sûre de ce que tu dis ?!?
Rosalie avait éclaté en sanglots.
- Oui, André. Girodelle s'en est vanté lui-même. Il a payé son valet pour
faire le sale travail mais il était caché juste à côté, c'est lui qui a voulu
faire tuer monsieur de Fersen. il a été tellement cruel avec la pauvre Oscar ! André ! Je me dégoûte tant de l'avoir aimé ne serait-ce qu'une minute !!
André prit Rosalie dans ses bras. Qu'allait faire Girodelle, à présent ?
Récupérer Oscar par la force ? Il n'en était pas question. André avait
mal pris l'annonce de sa liaiosn avec Hans-Axel, mais il valait encore mieux qu'elle parte avec lui plutôt que de retourner auprès d'un assassin. Seulement cet assassin était son mari. Pour lui échapper, Oscar devrait-elle fuir toute sa vie ? "Viens avec moi, Oscar. Moi je suis anonyme, on ne nous retrouvera pas. Fersen ne pourra pas vivre ainsi, il ne se retirera pas loin de la Cour sous une fausse identité. Girodelle peut vous retrouver jusqu'en Suède s'il craint d'être inquiété par la justice, si son honneur est bafoué par ta fuite..." Pourtant, il savait qu'Oscar refuserait de partir avec lui.
- Rosalie, Oscar dort toujours ?
- Oui, elle a reçu un terrible choc, hier. J'avais peur qu'elle perde son enfant
mais le docteur a dit que tout allait bien. Pourvu que Girodelle ne vienne
pas ici ! Il me dégoûte, André !
André la serra un peu plus dans ses bras. Le silence absolu ... On
n'entendait que le mouvement régulier du balancier d'une grosse horloge. Puis André embrassa Rosalie. Ses lèvres étaient si douces ...
- Oh, je ne sais pas ce qui m'a pris ! Je ... Je vais voir Fersen, à plus tard.
Interloquée, la jeune fille le regarda s'éloigner. Se pourrait-il qu'André éprouve quelque chose pour elle ? Rosalie se surprit à le souhaiter de toutes ses forces. "André, nous sommes plus proches que tu ne le crois. Toi rejeté par Oscar, moi fuyant l'amour honteux que je portais à Girodelle ... Ensemble nous pourrions panser nos blessures."
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyMar 29 Nov - 22:11

Chapitre IX


Hans-Axel était de fort joyeuse humeur.
- André ! Je crois savoir que c'est à toi que je dois la vie, n'est-ce pas ? Ha ha ! Rentrer des Amériques en un seul morceau et tomber dans une embuscade de coupe-jarrets ici ! Ha-ha-ha !
- Je vois que cela vous amuse.
- Mais non ! Seulement, tu comprends, père aurait été furieux, il te sera reconnaissant !
Hans-Axel arrêta de rire car cela contractait son ventre et ses blessures le faisaient encore souffrir.
- Je me demande si j'ai bien fait. Il me semble que c'est votre conduite qui est cause de ce qui est arrivé, et Oscar en souffre beaucoup. Vous êtes le spécialiste des ménages à trois !
- Plaît-il ?
- Vous ne devinez pas ? Girodelle a payé son valet pour qu'il vous tue. Il sait tout. Je sais tout. Comment avez-vous pu faire tant de mal à Oscar ?
- Du calme, André ! Il me semble que c'est Girodelle qui lui a fait du mal, non moi. Oscar et moi assumons totalement notre "conduite", comme tu dis. André, quand comprendras-tu qu'Oscar ne t'aime pas ?
André aurait voulu l'étrangler. pourtant, il savait que Fersen avait raison. C'était peine perdue.
- Ecoute, André, si tu me reproches la grossesse d'Oscar, sache que je prendrai mes responsabilités. Mais je ne peux pas l'épouser tant que Girodelle est vivant.
- Et cela vous arrange, n'est-ce pas ? Et par votre faute Oscar va
devoir se cacher car il est hors de question qu'elle retourne auprès
de son époux.
- Imagine les choses autrement. Qui est au courant ?
- Tout le monde, ici.
- Alors imagine que Girodelle soit condamné. Mais il n'est pas nécessaire qu'il monte sur l'échaffaud. Je crois pouvoir négocier la liberté d'Oscar. S'il ne veut pas être arrêté il devra la laisser partir avec moi. N'oublie pas qu'il ne s'attend pas à me voir vivant. Nous irons vivre en Suède et nous n'entendrons plus jamais parler de lui.
- Vous voulez dire que vous ne verrez plus la reine ?
André nota le silence d'hésitation du comte.
- Je ne verrai plus la reine.
Pourquoi négociait-il donc avec André ? Hans-Axel soupira. Il se sentait pris au piège.

Lorsqu'Oscar se réveilla, la journée était déjà bien avancée. Elle
rencontra André dans l'escalier. Elle ne l'avait pas vu depuis son
mariage. André tressaillit : le face-à-face qu'il attendait et redoutait !
- Oh, André, tu es revenu ! Tu as sauvé Hans !
- Oui, je suis revenu, j'ai sauvé Hans, enfin, Fersen, répéta-t-il d'une voix monocorde.
Il renonça à lui avouer son amour.
- Tu m'excuseras, mais je crois que Fersen t'attend. A plus tard.
Il ne se retourna pas lorsqu'elle entra dans la chambre. "Ooh, Rosalie,
nous sommes plus proches que tu ne le crois. Toi fuyant l'amour
honteux que tu portais à Girodelle, moi rejeté par Oscar... Ensemble,
nous pourrions panser nos blessures." Comme Rosalie un peu plus tôt, André colla son oreille à la porte. Hans-Axel faisait à Oscar toutes les promesses possibles. Les choses semblaient si simples à l'entendre ! La voix d'Oscar était chargée d'émotion. Elle murmura quelque chose qu'André ne comprit pas. A sa grande stupeur, Hans-Axel éleva la voix :
- Dites-le plus fort, ma chère Oscar, pour André. Il est en train d'écouter à la porte !
Comment avait-il deviné ?
- Je vous suivrai en Suède, Hans.
Puis Fersen attira la jeune femme contre lui et s'empara de ses lèvres.
La décision d'André était-elle motivée par le dépit ? Le jeune homme,
surpris en flagrant délit d'espionnage, trouva Rosalie dans le jardin.
Avant qu'elle ne puisse dire que que ce soit, il se jeta à ses pieds.
- Rosalie, veux-tu être ma femme ? Nous finirons par nous aimer,
j'en suis sûr !
Un bref instant s'écoula.
- Oui, André, dit-elle enfin. Je veux bien devenir ta femme.
Dépit ? Défi ? Qui le saura ?

Girodelle avait rapidement retrouvé ses esprits. Le coup qu'il avait reçu sur la tête le faisait grimacer de douleur. "Rosalie est au courant. La
petite garce m'a assommé..." La situation lui échappait. Il n'avait pas
pensé qu'Oscar pouvait s'enfuire. Bien sûr, elle devait être au château
Jarjayes mais qui sait à combien de personnes avait-elle raconté ce
qu'il lui avait si complaisamment avoué ? A Versailles, l'inquiétude de
Girodelle prit des proportions encore plus grandes. On dit à la reine
que Fersen avait échappé à la mort ! Girodelle ne parvenait plus à se
souvenir s'il était ou non conscient lorsqu'il s'était approché. Et s'il
l'avait vu ? Il allait parler ! Mais non, il avait eprdu connaissance.
- Colonel de Girodelle, vous êtes si pâle ! Que vous arrive-t-il ?
interrogea la reine.
- Vo... votre majesté, je... je frémis à l'idée que de tels actes aient
lieu impunément.
- Oh mais rassurez-vous, colonel. Nous retrouverons les responsables,
nous les traquerons, et ils seront impitoyablement châtiés quels
que soient leurs rangs.
Puis la reine s'était retirée dans ses petits cabinets pour pleurer
à son aise de colère et de soulagement, laisser libre court à son
chagrin. Elle avait failli perdre Fersen. Elle n'avait pu masquer son
inquiétude tandis qu'il luttait entre la vie et la mort. Elle avait voulu
lui envoyer son médecin mais Mme de Noailles l'avait convaincue
que c'était là une trop grande imrpudence. Elle savait qu'on l'avait
emmené au château Jarjayes. Oscar était-elle auprès de lui ?
Girodelle ne parlait jamais d'elle. Il fallait que la reine l'interroge.
Ainsi Marie-Antoinette avait appris qu'Oscar allait donner un héritier
à son époux. Elle ne soupçonnait rien qui eut un rapport entre la
jeune femme, Girodelle et Fersen.
De retour chez lui, Girodelle s'isola dans son bureau. Le coup de
chandelier de Rosalie avait le mérite de lui avoir rendu toute sa lucidité.
Il venait de comprendre quelles folies il avait commis. Son amour
éperdu pour Oscar l'avait rendu fou à lier, l'avait conduit au meurtre.
Il réalisait enfin toute la portée de ses actes. Fersen avait survécu et
tout le monde chez les Jarjayes devait savoir. Il savait que le général
était absent, sinon il serait déjà venu lui demander des explications.
Demain, peut-être, un nouveau messager le dénoncerait. Girodelle
avait tout dit à Oscar, persuadé que les choses en resteraient là car
la jeune femme ne voudrait certainement pas étaler aux yeux de tous
sa coupable liaison avec l'amant de la reine. Il n'en était plus sûr, à
présent. Oscar devait se moquer que toute la Cour le sache, que la
reine la haïssent puisqu'elle se moquait de déshonnorer le nom des
Girodelle. De son côté, la reine cherchait un coupable d'autant plus
que c'était son cher Suédois qu'on avait osé attaquer. "Françoise,
voyez les folies que l'on commet pour l'amour de vous... J'aurais dû
garder tout cela secret. Apprendre que Fersen succombait à ses
blessures vous faisez déjà souffrir plus que de raison. Je suis devenu
un monstre. Votre enfant aurait été le mien, nous serions reparti de
zéro. Vous auriez oublié Fersen..." Car Girodelle ne regrettait pas
son crime. Il n'éprouvait de remords que pour Oscar. Son honneur
était en jeu, il avait agis comme il croyait être juste. Il ne pensait pas
être inquiété. Mais voilà que son honneur était une fois de plus menacé.
Non, Girodelle ne monterait pas sur l'échaffaud, c'était inacceptable.
D'un geste brusque, il ouvrit le coffret dans lequel il rangeait ses pistolets.
Un coup de feu brisa le silence qui régnait dans la demeure...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyJeu 1 Déc - 20:39

Chapitre X


Alertés par le coup de feu, les domestiques se précipitèrent
dans le bureau du comte.
- Mais que se passe-t-il ? C'est un coup de feu, on dirait !
Monsieur ! Monsieur, qu'est-il arrivé ? Aaaaah !!!
Le corps sans vie de Girodelle gisait sur le sol. Il tenait l'un
de se spistolets dans sa main crispée.
- Monsieur s'est brûlé la cervelle ! Au secours !!

De la fenêtre de sa chambre, Oscar vit un homme entrer dans
la propriété. Elle reconnut Firmin, le cocher de son mari. Il devait
venir la chercher, bien sûr. Hans-Axel viendrait aussi, il avait
promis de persuader Girodelle qu'Oscar avait tout intérêt à le
suivre en Suède. Elle descendit l'accueillir en sa compagnie.
L'attitude de Firmin l'inquiéta. Il paraissait bouleversé au plus
haut point et ses mains tremblaient comme il ôtait son chapeau
pour saluer.
- Qu'y a-t-il, Firmin, vous êtes si pâle !
- Madame la comtesse... Un grand malheur est arrivé... Monsieur
le comte a... a... a mis fin à ses jours !
- Que dites-vous ?!
Hans-Axel dût soutenir Oscar qui allait défaillir. Girodelle avait
commis l'irréparable ! Girodelle s'était suicidé !
- Madame la comtesse... Que madame la comtesse me pardonne,
mais... Enfin, je ne sais pas ce qui s'est apssé tantôt entre monsieur
et vous, et cela ne me regarde pas, mais il ne faut pas que la
nouvelle se sache. Tous ses gens se sont concertés et nous avons
décidé qu'il valait mieux cacher la vérité. Nous dirons que
monsieur a été victime d'un accident alors qu'il nettoyait ses armes.
- Oui, approuva-t-elle comme un automate. je ne veux pas
que l'on refuse une sépulture chrétienne à mon époux.
Sur ces mots, Oscar s'évanouit.

Lorsqu'Oscar revint à elle, elle était couchée dans son lit et le
visage inquiet de Hans-Axel était penché sur elle.
- Hans...
- Chut, reposez-vous. Le choc vous a fait perdre connaissance.
Je vous ai examinée : vous allez très bien et notre enfant également/
- Hans...
- Oubliez-vous que j'ai étudié la médecine en Italie ?
Le sourire triste d'Oscar lui brisa le coeur.
- Vous culpabilisez, n'est-ce pas ?
Oscar ne répondit pas.
- Vous ne devez pas culpabiliser.
Il soupira.
- Voulez-vous que je fasse appeler André ?
- Non, Hans. Votre amour seul peut guérir mon coeur.

André et Rosalie furent mis dans la confidence. Rosalie pleura mais ce n'était pas pour Girodelle. C'était pour Oscar qui endurait de
nouvelles épreuves. Pour aimer Hans-Axel, le sang avait coulé, trop
de sang. Que leur réservait l'avenir ? André ne savait plus si le
responsable de cette tragédie était Fersen ou Girodelle. Il ne parla pas
de son intention d'épouser Rosalie. Ce n'était pas le moment. Il fallait
d'abord s'assurer qu'Oscar et son enfant trouvent la paix.

Ce fut en grande tenue de deuil qu'Oscar fut reçue par la reine après les funérailles. Car le comte de Girodelle avait bien été victime d'un accident, n'est-ce pas ? Pouruqoi en douter ? Depuis dix mois, tous
ses voeux avaient été exaucés : il était devenu colonel, avait une
charmante épouse et celel-ci attendait un enfant. Rien ne pouvait laisser
soupçonner la véritable nature du décès de Girodelle.
- Oh, ma pauvre amie !
Oscar n'avait guère de diffcultés à jouer la veuve inconsolable car
la mort de son époux avait été pour elle un choc d eplus. Malgré la
façon ignoble dont il s'était conduit, elle ne pouvait se réjouir de sa
disparition, même si cela la libérait de son carcan. Un homme était mort
à cause d'elle. Mais Hans lui avait rappelé ses promesses. L'épouser le
plus vite possible. C'était là la requête qu'il présentait au roi, sans lui
révèler qu'il était responsable de la grossesse d'Oscar. La comtesse de
Girodelle, disait-il, bouleversée, s'était confiée à lui. Elle voulait quitter
ces lieux où tout lui rappelait son époux qu'au fil des jours elle avait
appris à aimer. Elle allait avoir un enfant. Elle ne pouvait rester sans
époux. Et Fersen était prêt à se dévouer en tant qu'ami fidèle.
- Sire, je souhaiterais à ses fins épouser la comtesse de Girodelle en
secondes noces, s'il plaît à votre majesté.
L'idée n'enthousiasmait guère Louis XVI. Comment ! Des secondes
noces ! Sans même attendre que ne s'écoule la période de deuil !
Avec un Protestant ! Le roi regrettait amèrement l'instant où il avait
songé à faire d'Oscar sa maîtresse. "Voilà sans doute ma puniiton",
songeait-il, convaincu d'avoir offensé Dieu.
- Ce que vous sollicitez, comte de Fersen, ets bien délicat. Le colonel
de Girodelle vient à peine d'être mis en terre, que dira-t-on !
Cepedant, le roi ne pensa pas un instant qu'il pouvait y avoir anguille
sous roche, que l'enfant d'Oscar était celui de Fersen. Dame ! La Cour
ne parlait que de l'intérêt du comte pour la reine, cela suffisait, non ?
Bien sûr, celui-ci avait brillé par son absence à la Cour à son retour des
Amériques, sans doute avait-il quelque maîtresse, mais pourquoi aurait-il
dû penser à Oscar ? Oscar qui s'était refusée à son roi ?
- Soit, dit Louis XVI en soupirant, je vous permet d'épouser Oscar de
Girodelle mais dans une petite chapelle, dans un endroit retiré, loin de la
Cour, et à la condition que vous ne tardiez pas à rentrer en Suède.
Sans doute le roi pensait-il tenir là un moyen d'éloigner Fersen de Trianon
tout en cédant à sa requête, et en se débarrassant de ce couple qui ne
lui attirait que des ennuis.
- Votre majesté, je suis votre humble serviteur.

Le mariage d'Oscar et Hans-Axel fut tout l'opposé de celui de Girodelle où leurs majestés étaient présentes. Un mariage à la limite de la clandestinité. C'était le prix à payer pour que l'enfant d'Oscar soit légitimement reconnu par les Fersen. Un mariage somptueux en Suède aurait été impossible,les rondeurs d'Oscar ne pouvant plus être dissimulées. Avant qu'elle ne quitte la France pour commencer une nouvelle vie, elle revit brièvement ses parents que le roi avait mis dans la confidence. le général ne comprit pas cet empressement à partir avec Fersen. Et s'il comprit, il ne dit rien. De la même manière, Hans avait revu Marie-Antoinette. Il lui avait dit que son père se faisait insistant quant à la nécessité de prendre une épouse et que telles étaient les raisons de son retour en Suède. Le désespoir de la reine était palpable mais Hans fut fort et résista, s'abstint de la prendre dans ses bras.
- Oscar a bien de la chance...
Le désarroi, la détresse de la reine lui serrait le coeur. Il devait partir avant de succomber une nouvelle fois. Il ne pouvait rompre les serments qu'il avait fait à Oscar.
Juste avant de partir, Oscar assista au mariage d'André et Rosalie. Elle avait ressentie une joie sincère lorsqu'elle avait appris la nouvelle. Elle leur fit ses adieux. Elle suivit Hans en Suède, sans savoir quelles nouvelles épreuves l'attendaient là-bas...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyVen 2 Déc - 22:51

Chapitre XI


Oscar n'avait pas prononcé un mot à l'approche des côtes suédoises. Elle redoutait sa rencontre avec la famille de Hans, se doutant que ce mariage précipité et presque clandestin n'était pas pour leur plaire. Avait-elle fait le bon choix ? N'aurait-il pas mieux vallu pleurer Girodelle et rester dans le château des Jarjayes ? Aux yeux de la Cour, l'enfant qu'elle portait était celui de Victor-Clément. André, Grand-mère et Rosalie auraient gardé le secret. Mais Hans... Il ne l'aurait peut-être pas accepté. De plus, elle l'aimait profondement. Sur ses sentiments, elle n'avait pas de doute. Peut-être un petit pincement au coeur lorsqu'elle avait fait ses adieux à André, mais sans en connaître d'autre raison que celle de l'ami d'enfance, du frère d'armes que l'on quitte. Elle lui avait demandé de ne pas être triste, de ne penser qu'à son bonheur avec Rosalie Grandier. Elle se résignait donc à affronter l'accueil glacial de Fredrik-Axel.

Hans avait écrit à son père pour lui annoncer qu'il s'était marié, comme il le lui avait ordonné tantôt. Il avait volontairement changé la date du mariage afin que cela corresponde mieux à la grossesse d'Oscar. Il lui avait écrit, et ils s'étaient embarqué pour la Suède sans attendre de réponse. Cependant, Hans ne se faisait guère d'illusion sur l'accueil que lui réservait son père. Il n'allait pas apprécier.

L'accueil fut effectivement glacial à la hauteur de ce qu'il avait imaginé. Seule Sofia s'était montrée amicale, voyant Oscar fort mal à l'aise. Fredrik-Axel reçut Oscar avec beaucoup de hauteur, tenant à lui signifier qu'elle n'était pas la bienvenue et qu'elle ne serait jamais réellement une Fersen, sans se départir pour autant d'une courtoisie de convenance. Fabian ne disait rien, mais affichait un petit sourire narquois guère plus encourageant. Pourtant, sa physionomie lui plut. Certes il ressemblait à Hans avec l'inévitable "air de famille", mais ses boucles blondes retombaient sur des yeux rieurs, pétillants de malice et cet air moqueur, bien qu'il lui soit destiné, la poussa à lui accorder sa sympathie en attendant de mieux le connaître.

La présentation fut brève. Hans fut fort contrarié en constatant que sa soeur Hedda et sa mère n'avaient pas daigné être présentes. Aussi, très rapidement, il se leva.
- Pardonnez-moi, père, mais je souhaiterais accompagner Oscar à ses appartements. Sa grossesse la fatigue beaucoup.
Oscar... Encore un sujet délicat. Il avait dû expliquer dans sa lettre qu'Oscar était une femme. Une femme que l'on avait élevée en soldat. Cela avait mortifié Fredrik-Axel.
- Très bien, Hans, mais j'ai à vous parler. Je vous attends dans mon bureau, mon fils.

Comme il s'y attendait, Hans eut droit à un sermon. Fredrik-Axel était furieux.
- Comment ! Lorsque je vous donne l'ordre de prendre épouse, vous fuyez aux Amériques, et lorsque vous voilà de retour, au bout de plusieurs années, vous épousez une femme que l'on a élevé comme un homme, que je ne connais pas, et sans solliciter l'avis de votre famille ?
Hans ne répondit pas.
- Cette affaire amuse beaucoup votre frère, vous avez dû vous en rendre compte. Fabian pense que vous l'avez séduite et que vous avez été contraint de l'épouser par un père outragé. Il pense même qu'elle était déjà enceinte de vos oeuvres. Comment avez-vous pu vous faire prendre de la sorte, tomber dans ce piège ? Je ne critique pas votre libertinage, mais je souhaitais une meilleure union pour vous.
Hans soupira.
- Père, je ne suis tombé dans aucun piège. J'aime Oscar et je lui ai demandé de devenir ma femme. Le père d'Oscar n'a nullement joué le rôle que vous prétendait. Ne souhaitiez-vous pas que votre fils ait une descendance légitime ?
Le père et le fils étant têtus tous les deux, il était inutile de poursuivre la conversation plus avant.

Oscar était perdue dans ses pensées. N'était-elle pas plus heureuse lorsqu'elle menait la vie d'un homme aux côtés d'André ? Pourtant elle se sentait la plus heureuse des femmes chaque fois qu'elle posait la main sur son ventre. Elle allait avoir un enfant alors qu'un événement aussi extraordinaire aurait dû lui être refusé du fait de la vie que son père avait voulu lui faire mener. Son père... Elle ne l'avait pas revu depuis longtemps. Elle vivait auprès de Girodelle, à ce moment-là, elle était son épouse. Le général de Jarjayes avait été tyranique à bien des égards envers elle, mais elle lui était gré de ce qu'il lui avait appris. Girodelle avait été tyranique, lui aussi, mais c'était pour lui sa façon d'aimer, sa façon d'exprimer des sentiments si longtemps contenus et étouffés... et sa déception devant le peu d'intérêt qu'Oscar lui avait témoigné. Fredrik-Axel était une autre sorte de tyran. Il ne semblait pas près à l'accueillir au sein de sa famille. En se mettant à sa place, elle pouvait comprendre ce qu'il ressentait. Mais elle était fort attristée et peinée par ce rejet. André était bien loin, à présent... Il ne lui restait plus que l'amour de Hans et cet enfant qu'elle chérissait déjà du plus profond de son âme...

Oscar se dirigea vers les appartements de Hans. Elle les trouva facilement, ils communiquaient avec les siens. Tout doucement, sans faire un seul bruit, elle ouvrit la porte de sa chambre. Elle ne put esquisser le moindre geste, elle devint muette, interloquée. Près de la cheminée, Hans serrait dans ses bras une jeune soubrette.
Oscar était pétrifiée. Elle aurait dû se ruer dans la pièce, faire quelque esclandre, mais elle ne le fit pas. Elle savait que personne ne la consolerait, que personne n'éprouverait de compassion pour elle. Elle était brisée une fois de plus. Tout aussi silencieusement, elle repris le chemin de ses appartements. Non sans avoir entendu la jeune fille chuchoter "Oooh, Monsieur, vous êtes revenu !!".
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptySam 3 Déc - 21:56

Chapitre XII


Quelques jours plus tard, Hans décidait qu'il était grand temps de présenter son épouse à la Cour. Son père, tout en gardant une distance toute calculée, savait qu'il ne pouvait en être autrement. Sa Majesté avait été informée du mariage et tenait absolument à rencontrer Oscar. Fredrik-Axel ne pouvait s'y opposer, même s'il désapprouvait farouchement le choix de son fils.

Hans avait quelque inquiètude au sujet d'Oscar. Depuis qu'elle foulait le sol suèdois, elle était maussade, et même de méchante humeur. Certes, sa famille lui avait fait mauvais accueil, mais elle devait s'y attendre et montrer de l'humeur n'arrangerait pas les choses. Certes, elle avait quitté son pays, sa famille, André. Certes, elle était enceinte, et son état avait sans doute quelque influence sur son humeur. Mais il devait y avoir autre chose. Il commençait à se demander si elle ne regrettait pas d'être venue en Suède...

La raison de cette humeur se nommait Wilhelmine. C'était la jeune soubrette bavaroise que Hans avait rencontré au cours de ses voyages et qu'il avait attaché à son service. Cette jeune soubrette qu'elle avait surpris dans ses bras, tendrement enlacée, alors qu'elle venait de subir le méchant accueil des Fersen. Oscar avait besoin de l'amour de Hans pour la soutenir dans ce pays qui lui était hostile, et lui pendant ce temps batifolait avec sa soubrette. Oscar avait été incapable de lui parler de Wilhelmine, incapable de lui demander des explications.

Depuis qu'on l'avait mariée au Comte de Girodelle, sa vie n'avait été que désolation, désastre. La seule lumière qui la guidait avait été Hans, et voilà que loin de France il l'abandonnait pour se livrer à quelque obscure droit de cuissage. Pourtant, elle se taisait. Non, elle ne lui dirait pas ce qu'elle avait vu. Elle tâcherait d'oublier. Elle ne devait penser qu'à son bébé à naître. L'espoir faisait vivre, disait-on. Elle mettrait sur le compte du désarroi l'attitude de Hans, désarroi d'être désapprouvé par sa propre famille. Elle croyait ne pas avoir perdu son coeur. Hans avait été très tendre avec elle, peu après le départ de Wilhelmine. Il était toujours aussi amoureux. Mais elle craignait que le mariage ne le change rapidement, elle craignait ne pas vivre heureuse bien longtemps...

Sa Majesté fut bien plus chaleureuse que la famille Fersen. Gustav III lui fit bon accueil, enchanté de rencontrer celle qui avait su capturer le coeur de l'un de ses amis les plus chers. Amusé également qu'elle porte un prénom masculin. Il avait fallu lui en dire la raison. Puis le Roi avait convié Oscar à l'une de ses répétitions. Il adorait le théâtre, et au palais de Drottningholm il organisait des représentations dont il tenait lui-même les rôles, à la manière de Marie-Antoinette. D'une affectueuse tyranie, il réquisitionnait tous ses amis pour être comédiens à ses côtés, et Hans était du nombre lorsqu'il se trouvait en Suède. Oscar aurait voulu s'y soustraire, mais accepta par respect pour le Roi. Elle ne s'était jamais livrée à ce genre d'exercice et parut bien piètre comédienne. Fort heureusement, son état l'en dispensa très rapidement.

Pour fuir l'animosité de son père et les railleries de son frère à propos de "Hans, surpris par un père jaloux et traîné devant l'autel pour avoir déshonnoré sa fille", Hans proposa à Oscar l'éloignement dans l'une des propriétés qu'il possédait à la campagne.
Oscar accepta avec joie. Elle avait besoin de calme, d'air, de tranquilité. elle voulait elle aussi échapper à la froideur de Fredrik-Axel et à l'exubérance du Roi dont l'enthousiasme l'épuisait souvent. Sofia, qui n'en demeurait pas moins son amie car elle appréciait Oscar et s'amusait à défier son père et son époux, leur avait proposé Lövstadt où elle résidait, mais elle fut fortement contrarié lorsque Adolf-Ludvig Piper, son mari, avait refusé de recevoir Oscar : "Madame, cette maison n'a pas besoin de deux fortes têtes. Vous y pourvoyez largement." L'insulte la fit pâlir de rage. Où avait-il pris qu'Oscar était une forte tête ? Il devait savoir lui aussi qu'Oscar avait un passé de soldat. Dépitée, elle promit néanmoins à son amie de lui rendre souvent visite à Steninge Slott, où Hans l'emmenait.

Oscar fut folle de joie lorsqu'elle apprit que Wilhelmine ne serait pas du voyage. Elle comptait bien garder Hans pour elle toute seule. Elle lui ferait oublier toutes les soubrettes de la terre...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyMar 6 Déc - 20:17

Chapitre XIII


Quelques mois ont passé... Quelques mois de pur bonheur pour Oscar. Loin des déplaisantes semaines passées auprès de la famille de Hans,elle goûtait enfin aux joies du mariage dans le cadre si paisible de la campagne suédoise. La vie à Steninge Slott lui fit oublier les drames passés, lui fit oublié Wilhelmine. Non, cette fille ne pouvait être une menace pour elle. Hans avait eu un instant de faiblesse, voilà tout. Elle s'en était convaincue, une fois la colère passée. Depuis leur installation à Steninge, il avait été le plus merveilleux, le plus attentionné des époux. Il était tel qu'elle l'avait rêvé, son sauveur amoureux et invincible. Il n'était préoccupé que de sa grossesse et de son bien-être. Il lui disait chaque jour qu'il l'aimait. Il ne parla pas une seule fois de Marie-Antoinette... Pas une seule fois... Sa conduite était irréprochable. Elle ne le vit pas une seule fois entretenir des comportements ambigüs avec les servantes ou les paysannes du domaine. Il y en avait pourtant de bien jolies... Oscar rayonnait... Elle pensait de temps à autre à André, espèrant qu'il connaissait auprès de Rosalie le même bonheur...

Près d'Arras, les mois ont passé aussi, moins limpides sans doute. Si Rosalie était aveuglée par ses sentiments tous neufs à l'égard d'André, comme elle l'avait été auparavant pour le Comte de Girodelle, le jeune homme avait gardé son coeur pour Oscar. Ce mariage avec Rosalie aurait pu lui apporter le bonheur. Elle l'aimait et lui était dévouée, ils étaient amis depuis longtemps. Mais André souffrait parce qu'il s'efforçait de faire semblant. Si son coeur n'appartenait et n'appartiendrait jamais qu'à Oscar, il aimait trop Rosalie pour lui faire de la peine, la faire souffrir. Il s'efforçait de cacher ses tourments, ignorant la vie que menait Oscar en Suède. Il avait reçu quelques lettres, mais elles ne disaient pas grand chose. Elle lui disait être heureuse auprès de Hans, elle l'informait sur l'avancée de sa grossesse, voilà tout. André ne pouvait pas savoir si son bonheur était vrai ou si elle voulait y croire. De cette expectative naissaient ses tourments. Il aurait voulu la voir pour en juger lui-même. La voir pour être rassuré sur son sort, puisque désormais son sort dépendait d'un autre, puisque ce sort qui lui avait été si cher depuis son enfance était entre les mains omnipotentes du Comte de Fersen.

Souvent, André se levait à l'aube pour contempler le lever du soleil. Il allait s'asseoir sur un petit talus et attendait l'astre du jour. Rosalie venait le rejoindre lorsqu'elle s'éveillait à son tour. Elle s'asseyait à ses côtés et demeurait silencieuse. Au fond de son coeur, elle savait qu'il pensait à Oscar, mais étant très éprise de son mari, elle gardait l'illusion d'être l'objet de ses pensées premières. André était loin d'être un époux négligent. Son affection pour Rosalie était immense, il se surprenait même à l'aimer comme on aime une épouse. De plus, elle était le seul témoin de leur vie passé. Il n'avait pas revu Grand-mère depuis son mariage. Bien sûr, il lui rendrait visite, mais il ne souhaitait pas vraiment se retrouver en face du général. Le général de Jarjayes n'avait pas vraiment apprécié le remariage précipité de sa fille après la mort de Girodelle, et le pauvre André s'attendait toujours à des reproches. Fort heureusement, le général de Jarjayes lui avait exprimé sa joie à la nouvelle de son mariage, ainsi qu'à Rosalie qu'il aimait beaucoup, et il leur avait laissé la jouissance de ses terres près d'Arras.

Au fond de son coeur, André voulait partir en Suède. Dans ses rêves les plus fous, il allait la chercher et il la ramenait en France où ils vivaient heureux pour l'éternité. Las ! Rêve impossible ! De plus, même si Fersen mourait subitement, comment pourrait-il infliger une telle souffrance à Rosalie ? "Rosalie... Je sais que tu m'aimes... Même si mon coeur ne peut être totalement à toi, je n'ai pas le droit de te faire souffrir... Ce mariage que j'ai choisi, je m'y tiendrait, et je m'efforcerais comme je le fais chaque jour de te rendre heureuse, et de trouver le bonheur moi-même avant qu'il ne soit trop tard, auprès de la plus douce des femmes qui soit. Oscar est ma déesse, étoile inaccessible. Je ne peux briser une union raisonnable pour commettre une folie. Je cacherai jusqu'à mon dernier soupir cette passion qui m'emporte malgré moi, je veillerai à ce que Rosalie ne pleure plus jamais, ne verse plus de larmes."

Un jour, enfin, André reçut une nouvelle lettre d'Oscar. Elle venait de mettre au monde un petit garçon prénommé Axel. Son coeur se serra à cette pensée, pourtant il savait qu'il n'en avait pas le droit et qu'il devait se réjouir pour elle. Il devinait la joie de Fersen. D'autant plus qu'Oscar lui assurait que Fredrik-Axel s'était laissé attendrir à la vue de son petit-fils et qu'il semblait un peu mieux disposé à son égard. Bien sûr, Sa Majesté lui avait recommandé de montrer plus de sympathie envers sa bru, mais le père de Hans avait peu à peu su montrer qu'il avait bon coeur au fond. Oscar se sentait mieux acceptée au sein de sa nouvelle famille. Sofia avait tenu ses promesses et l'avait visitée souvent, se révélant une véritable amie. Fabian se montrait charmant. Désormais, seules Hedda et la mère de Hans lui battaient froid.

Oscar ignorait que, quelques jours seulement après la naissance de son fils, Hans avait reçu une lettre codée de Marie-Antoinette. Il n'y avait pas répondu... mais il la lui avait cachée... Il savait qu'il en recevrait certainement d'autres et il redoutait le jour où il serait assez faible pour écrire à la Reine. Il savait que ce jour-là il serait perdu... Il savait que ce jour-là verait l'amoncellement de sombres nuages sur leur vie à tous...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyMer 7 Déc - 20:06

Chapitre XIV


Deux années s'étaient écoulée depuis l'instant où Oscar avait foulé le sol suédois. Deux années heureuses contrairement à ce que l'accueil laissait présager. Oscar s'était fait à sa vie de mère. Le petit Axel était son rayon de soleil. Affichant le fameux "air de famille", il annonçait déjà l'homme qu'il serait plus tard, un Fersen beau et fort comme son père, allié au tempérament de feu de sa mère, qu'elle dissimulait dorénavant sous des trésors de tendresse maternelle. On se plaisait à dire en Suède que l'humanité se composait de trois groupes, les Fersen, les Français, et la racaille : c'est dire si Hans était fier de son fils.

Deux années merveilleuses, à peine altérées par les absences de plus en plus fréquentes de Hans. Sa Majesté, en effet, s'ennuyait de lui et le réclamait à la Cour. Maintenant qu'il était de retour en Suède et qu'il comptait, visiblement, y rester, il n'avait pas vraiment d'excuse pour se dérober à ses obligations. Oscar était fort attristée lorsqu'il partait. Sofia restait près d'elle, trouvant là un excellent prétexte pour ne pas vivre auprès de son époux et se comporter comme elle l'entendait. Elle s'était donc installée auprès d'Oscar et faisait parfois venir ses propres enfants. Certes, cela ne remplaçait pas Hans, mais au moins Oscar n'était-elle pas seule. Un jour, enfin, elle dut se résigner à retourner à son tour à la Cour, sur un brusque caprice du Roi. Elle savait qu'en retrouvant l'hôtel particulier des Fersen elle retrouverait Wilhelmine... Wilhelmine ! Que s'était-il passé pendant les absences de Hans ? L'avait-il trompé impunément ? Avec Wilhelmine ? Des dames de la Cour ? Oscar sentit une bouffée de jalousie l'envahir, sentiment qu'elle n'avait plus éprouvé depuis son arrivée à Steninge.

Mais Oscar ne savait pas tout. Si elle pensait avec raison que Hans s'était livré à moult libertinage lors de ses séjours à la Cour, elle ignorait quel secret il cachait dans le secrétaire de son bureau. De très nombreuses lettres codées de Marie-Antoinette y étaient rangées avec soin. Toutes plus pressantes les unes que les autres. La Reine se livrait à de vibrantes envolées lyriques pour rappeler à son amant qu'elle ne l'avait pas oublié, qu'elle était si seule dans cette Cour qu'elle détestait, que lui, son seul ami, l'avait abandonné. Chaque mot faisait saigner le coeur de Hans. Certes, il aimait Oscar, il était sincère lorsqu'il le lui disait... Mais la Reine... C'était un amour que l'on ne pouvait qualifier. Tout comme André aimait Rosalie mais mystifiait Oscar, Hans aimait son épouse mais faisait de la Reine une amante sublimée. Il n'avait pas répondu à ses lettres... Jusqu'au jour où il le fit. Il savait que faisant cela il compromettait son bonheur à tout jamais, mais il le fit. Il écrivit à Marie-Antoinette... Ainsi, lorsque Oscar revint à la Cour, l'amour de Hans pour la Reine, tel le phoenix, renaissait de ses cendres, tout en entretenant sa réputation de galant. Sofia le savait, mais elle ne voulait pas qu'Oscar soit au courant. Elle l'avait promis à son frère chéri... Elle voulait protéger son amie...

Si Oscar ignorait tout de ce manège, une surprise l'attendait néanmoins. Fabian, le jeune frère charmeur et taquin, s'était pris d'amour pour elle. Un soir, il osa le lui dire.
Cet aveu allait innocemment déclencher la tragédie sans fin que devait être à tout jamais la vie d'Oscar.

Oscar fut troublée. Certes, elle appréciait Fabian, de sept ans son cadet. Mais de là à s'attendre à une déclaration d'amour ! Elle le mit sur le compte de "l'air de famille", se demandant parfois si Sofia elle-même n'entretenait pas de secrets penchants ambigüs pour elle. Mais Fabian venait de se déclarer. Il la prit dans ses bras, se penchant sur elle pour l'embrasser, tandis que Hans ouvrait la porte du petit salon où ils se trouvaient. Oscar s'était violemment empourprée. Elle avait détourné son visage pour échapper à Fabian, mais sa situation n'en était pas moins compromettante.

Hans était furieux. Il était à deux doigts de frapper son frère, ce qui ne lui était jamais arrivé. Fabian fila sans demander son reste, fort mécontent de sa si sotte maladresse.
- Et vous, Madame ? Que faisiez-vous dans les bras de mon frère ?
Oscar crut défaillir. La réaction de Hans lui fit horreur. Comment pouvait-il croire ce qu'il disait ? Elle comprit, alors. Hans l'avait trompé lors de ses absences et avait mauvaise conscience. Il devait penser qu'elle était au courant et qu'elle chercherait à se venger de la même manière. Cet esclandre était un aveu. Un aveu que ce qu'elle avait surpris avec Wilhelmine n'était pas un égarement malheureux. C'était l'aveu d'un mari adultère. L'aveu d'un homme qui n'avait d'ailleurs pas hésité à tromper la Reine lorsqu'il avait fait d'Oscar de Girodelle sa maîtresse. Elle y voyait clair, à présent.
- Ainsi, vous avez trahi les serments de notre mariage, Hans...
- Comment ?! Vous dites cela alors que je vous surprends dans les bras de mon frère ?!
- Oui, Hans... Votre frère m'a prise au dépourvu... Je le repoussais, mais vous ne l'avez pas compris, ajouta-t-elle d'une voix éteinte.

Sofia, qui avait accompagné Oscar, apparut sur le seuil du petit salon. Elle était devenue livide. Elle venait de croiser Fabian.
- Dès le jour de notre arrivée, je vous ai vu avec Wilhelmine, poursuivait Oscar. Le Comte la surprit alors par son expression d'incrédulité et le peu de cas qu'il faisait d'elle en ne cherchant pas à nier la chose.
- Wilhelmine ? Mais voyons, Madame, je n'éprouve rien pour Wilhelmine, et elle le sait. Il n'y a pas de sentiments entre nous !
- Je l'ai vu dans vos bras, j'ai vu ce que vous faisiez !
Hans perdait patience.
- Oscar ! Vous confondez sentiments et désir, je crois ! Cette scène est ridicule et n'a pas lieu d'être. Je vous ai ouvert mon coeur, laissez-moi agir à ma guise !

Soudain, Oscar eut peur. Jamais elle n'avait vu Hans en colère, jamais elle ne l'avait entendu crier. Elle n'avait jamais soupçonné qu'il puisse être ainsi. Certes, il n'avait pas hésité à lui faire commettre un adultère envers Girodelle, mais elle lui en avait presque fait la demande en se rendant chez lui comme elle l'avait fait... Elle venait de comprendre que jamais il n'avait eu l'intention de lui être fidèle, pas plus qu'il ne l'avait été à la Reine... son monde venait une fois de plus de s'écrouler... et elle savait qu'il ne se relèverait pas...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyVen 9 Déc - 1:57

Chapitre XV


Les mois qui suivirent cet incident furent malheureux. C'en était fini du bonheur qu'Oscar avait connu pendant deux ans à peine. C'en était fini... Hans était devenu tyranique, puis avait pris le parti de l'ignorer. Voir son épouse dans les bras de Fabian lui avait fait mal, bien plus qu'il n'aurait voulu l'admettre. Et parce qu'il culpabilisait de sa conduite, son animosité n'en fut que plus accrue. Lorsqu'il avait trompé Oscar, il ne pensait pas la faire souffrir parce qu'il l'aimait. Mais au fond de lui il savait bien qu'elle ne le comprendrait pas. Ses propres remords le conduisirent à regretter ce mariage.

Il se souvenait des paroles d'André lorsqu'il avait repris conscience, après l'agression ordonnée par Girodelle. André lui avait reproché la grossesse d'Oscar et l'avait accusé de ne pas prendre ses responsabilités. Il avait répondu qu'Oscar étant mariée il ne pouvait pas faire grand chose. "Et cela vous arrange, n'est-ce pas ?", telles étaient les paroles d'André. Hans avait éludé la réponse, il avait parlé du crime de Girodelle. Et lorsque André avait insisté et lui avait demandé s'il reverrait la Reine dans le cas où il pourrait partir avec Oscar, il avait hésité avant de répondre. André avait noté cette hésitation. Il le savait...

"Et cela vous arrange, n'est-ce pas ?"...

Et André avait raison... Son père avait raison... Il avait épousé Oscar à la mort de Girodelle, mais comment aurait-il pu prévoir cette mort ? Au fond de lui, il savait bien qu'il espérait de ne pas avoir à s'engager autant. Mais Oscar était tombée enceinte. Lorsqu'elle le lui avait dit, il pensait sincèrement que cet enfant passerait pour celui de Girodelle et que l'on en resterait là. Les événements s'étaient précipités, l'emportant dans un maelström qui lui échappait. Il regrettait de s'être mis dans une telle situation. Il se sentait piégé, comme son père le lui avait dit. Piégé par son sens de l'honneur. Il se rendait compte à présent qu'il avait épousé Oscar uniquement parce qu'elle attendait un enfant. Il avait pourtant cru l'aimer... Aurait-il fait d'elle sa femme, sans cela ? Il ne doutait pas d'avoir des bâtards dans toute l'Europe et jusqu'aux Amériques, et pourtant il avait épousé Oscar... Elle n'avait donc pas été une simple aventure... Et pourtant...

Les lettres que Hans écrivait à la Reine se multipliaient. Toutes plus vibrantes les unes que les autres...

De son côté, Oscar pleurait... Elle pleurait d'avoir perdu le seul homme qu'elle ait jamais aimé... Hans faisait preuve d'une insupportable froideur à son égard. Sa famille ne lui était d'aucun secours, faisant mine de ne rien voir du drame qui se jouait. Fabian se faisait oublier. Fredrik-Axel ne se souciait plus du comportement de son fils, tant que celui-ci remplissait ses responsabilités à la Cour et tant qu'il demeurait en faveur auprès de Sa Majesté. Si Sofia était encore son amie, elle-même commençait à se demander si le mariage de son frère était finalement une bonne idée. Elle ne supportait pas de le voir maheureux, bien qu'à plusieurs reprises elle lui fit remarquer qu'il ne servait à rien d'être aussi désagréable envers Oscar. Mais désagréable, il ne l'était plus qu'indirectement car il se comportait désormais comme si elle n'existait plus. Il voyait Wilhelmine. Il réservait tout son amour à son fils qu'il ne manquait pas de visiter à maintes reprises chaque jour... lorsque Oscar ne se trouvait pas près de lui...

Plus que jamais, les soubrettes recevaient les hommages de leur seigneur...

Oscar se surprit à pleurer Girodelle. Elle n'avait pas cherché à l'aimer. Elle n'avait vu en lui que l'homme qui l'avait arrachée à sa vie de soldat. Pourtant il lui avait été fidèle, malgré ce que Rosalie espérait. Il s'était comporté très correctement avec elle, et pourtant elle ne voyait en lui qu'un tyran. Bien sûr, elle ne pourrait jamais lui pardonner d'avoir volontairement attenté à la vie de Hans... Girodelle était devenu un assassin, et il avait été particulièrement cruel avec elle lorsqu'il avait reconnu son forfait. Elle le pleurait pourtant... Et elle pleurait à cause de la distance qui la séparait d'André et Rosalie. André... Si seulement elle pouvait le retrouver... Retrouver ce frère si cher à son coeur, ce compagnon des bons comme des mauvais jours...

Pourquoi ne pas le rejoindre ? Hans le remarquerait-il seulement, si elle partait ? Bien sûr, il avait besoin d'elle lorsque les représentations à la Cour l'exigeaient. Elle devait se tenir à ses côtés lorsqu'il plaisait au Roi qu'elle fut présente. "Mais je suis une personne libre !" Pour Hans, elle avait sacrifié son moi intérieur, elle s'était fait douce comme un agneau, avait abandonné sa combativité... Elle avait tout fait pour être une bonne épouse... Son tempérament de feu reprenait soudain le dessus. Elle partirait dès qu'elle le pourrait... Mais elle ne pouvait se résoudre à laisser son fils... Et elle se doutait que si Hans finirait par oublier l'affront de sa fuite, il n'accepterait jamais qu'elle parte avec le petit Axel... "Advienne que pourra !" Axel suivrait sa mère. Hans se lancerait à leur poursuite, mais elle tâcherait d'avoir suffisement d'avance pour retrouver André et trouver une solution... Maintenant, elle se moquait que son mari soit la risée de toute la Cour. Elle savait pourtant son projet risqué. La France était bien loin... Il lui faudrait parcourir nombre de contrées... Et après ? Quel avenir lui était réservé ? Elle savait que c'était folie, que Hans ne manquerait pas de la pouchasser pour reprendre son fils, mais elle devait essayer... Elle partirait, minée par le désespoir...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyVen 9 Déc - 22:21

Chapitre XVI


Au cours d'une promenade, Oscar s'était discrétement renseignée sur les bateaux en partance pour la France. Personne n'avait fait attention à elle, et c'était tant mieux. Elle ne tenait pas à être vu, elle ne tenait pas à ce qu'on l'empêche de fuir.

Par chance, il y aurait un bateau dès le lendemain à l'aube. Il lui faudrait se sauver au petit jour, avec son enfant et une malle. Difficile... Risqué... Mais elle n'osait pas mettre une servante dans la confidence. Elle avait peur...

Oscar avait rempli une malle dans une totale discrétion. Elle priait pour que Axel dorme. S'il se mettait à pleurer, tout serait perdu. Elle avait croisé un vagabond sur le port. Lui l'aiderait à porter la malle. Elle passerait discrètement par l'entrée de service. Il l'attendrait là...

A l'aube, le bateau quittait la Suède. Il allait en France. Oscar était à son bord avec le petit Axel. Lorsque Stockholm fut loin derrière eux, elle poussa un soupir. Le prochain bateau ne partirait pas avant un bon moment. Elle espérait avoir assez de temps pour trouver un refuge en France... sans savoir où elle irait. André l'aiderait...

Oscar avait généreusement récompensé le vagabond. Il était allé dans une taverne célébrer sa bonne fortune. Quelques heures plus tard, il riait, criait et chantait sous les fenêtres de Hans.
- Quel est ce tapage ? demanda le majordome.
"La Comtesse von Fersen s'en est allée !!!!!" glapissait-il.
Le majordome ouvrit la fenêtre.
"La Comtesse von Fersen s'est embarquée !!!!! Hips !!!!!!"
C'était un ivrogne, mais il avait très bien reconnu la demeure des Fersen.
"La Comtesse von Fersen est partie sur l'eau !!!!!!!!!!"
Le majordome sortit rapidement pour le rattrapper.
"La Comtesse von Fersen s'est sauvée sur un raffiot !!!!!!"

Après avoir interrogé l'ivrogne, le majordome alla, affolé, réveiller Hans. Il trouva le Comte au lit. A ses côtés dormait Wilhelmine, entièrement nue.
- Monsieur le Comte ! Madame la Comtesse est partie !
Hans crut que le monde s'écroulait.
- Comment ?! Que dites-vous ?
- Un vagabond l'a vue embarquer sur un bateau. Un bateau à destination de la France. Cela fait plusieurs heures, à présent !
Immédiatement, Hans mit ses culottes et bondit hors du lit. Le coeur battant, il courut à la chambre de son fils. Le petit Axel n'était plus là. Il crut mourir.
- Pourquoi ?! Pourquoi ?! criait-il.

Oscar était partie... Il était responsable de ce départ, il ne pouvait nier l'évidence. Mais il ne pensait pas qu'elle ferait une telle chose. Elle avait emmené son fils. Hans crut qu'on lui avait arraché une partie de lui-même. Il ne pouvait permettre cela, il la retrouverait. Il le fallait... Elle voulait le fuir ? Soit. Mais elle ne pouvait lui prendre son fils, non, il aimait cet enfant, il ne pouvait le supporter. Si elle le lui rendait, il était près à la laisser vivre comme elle l'entendrait en France. Il l'avait perdue, il le savait. Mais Axel était un enfant innocent ; il ne devait pas souffrir par la faute de ses parents. Et Axel était un Fersen. Il devait grandir parmi les siens. Hans fit rapidement préparer ses bagages, il partait. Mais il devrait attendre qu'il y ait un autre bateau. Cette attente le rendait fou de rage et de douleur. Oscar serait près de Arras chez André, il le savait. Et ce serait près de Arras qu'il le retrouverait...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptySam 10 Déc - 21:53

Chapitre XVII


Dans la petite maison près d'Arras règnait un silence oppressant... Ce matin-là, Rosalie était sortie avec son petit panier, en quête de champignons et de fleurs sauvages pour André. Ils avaient échangé un baiser, un signe de la main. André s'était mis à réparer la porte de l'écurie qui avait été endommagée par une tempête. Il n'avait jamais rechigné à la tâche, et la besogne fut vite accomplie. Il ramassa ses outils. Il se retourna et leva la tête.
- Oscar...
Il se crut victime d'une hallucination. Il se crut perdu dans un monde irréel. Ce ne pouvait être elle. Pourtant, en contrebas du petit sentier, une jeune femme blonde l'observait. Ce n'était pas Rosalie. Ce n'était pas une femme des environs. Cette chevelure d'or inimitable n'appartenait qu'à Oscar.

Oscar avait débarqué à Calais. Elle s'était fiée à son instinct pour trouver de braves gens qui accepteraient de l'accompagner pour porter sa malle jusqu'à Arras sans arrières pensées. Puis, une fois à Arras, elle s'était fait conduire jusqu'à la maison des Grandier, dans la proche campagne. Elle avait vivement remercié ces gens qui l'avaient aidée, et leur avait dit que leur chemin se quittait ici. Ils étaient partis. Elle attendait en bas du sentier. Sa malle posée à ses pieds, le petit Axel dans ses bras. Elle n'avait pas osé se faire conduire jusque devant la maison.

André avait accourru, s'attendant à se trouver ridicule lorsqu'il s'apercevrait qu'il ne s'agissait nullement d'Oscar. Pourtant, c'était bien elle... Comme il s'étonnait de sa triste figure et demandait où était Fersen, elle fondit en larmes. Il avait alors pris sa malle et l'avait conduite à la petite maison qu'il partageait avec Rosalie, à la fois comme frère et soeur et comme mari et femme.

Lorsque Oscar eut achevé son récit, André se sentit prêt à tuer Fersen. Il ne le dit pas, mais le silence oppressant qui avait envahi la petite pièce ne laissait aucun doute sur la douleur et la fureur qu'il ressentait. Son Oscar... Cet homme l'a rendu malheureuse au point de la contraindre à prendre la fuite... Il se souvenait s'être trouvé dans la même situation avant que Girodelle ne se suicide. Il savait que Oscar devrait se cacher et fuir toute sa vie pour échapper à cet homme pris de folie. Girodelle s'était suicidé, elle n'avait pas eu à fuir. Mais l'histoire ne se répéterait pas. Fersen n'en ferait pas autant car les circonstances n'étaient pas les mêmes. Il voudrait sans doute récupérer son fils à défaut d'Oscar. Et Oscar en souffrirait. Comment l'aider ? Où aller pour mener une vie anonyme à laquelle la jeune femme n'était pas habituée ? Comment disparaître ? Les Amériques... Fersen irait-il les chercher jusqu'aux Amériques ? Y retournerait-il ? Mais les Amériques étaient vastes... André savait alors qu'il partirait là-bas lui aussi. Il ne laisserait pas Oscar seule. Il emmenerait Rosalie car il ne pouvait l'abandonner, mais il partirait lui aussi... Cette nouvelle apporta un peu de réconfort à Oscar...

Oscar attendait le jour de leur départ pour Nantes avec impatience. A son tour, Rosalie avait beaucoup pleuré, s'emportant contre Fersen qui, tout comme Girodelle, la decevait amèrement.

Ce matin-là, Rosalie était de nouveau sortie... Elle s'était rendue à Arras faire les dernières emplètes pour le départ. Pourtant, ce fut quelqu'un d'autre qui poussa la porte de la petite maison...
- Fersen !!!!!!
André avait crié. Dans l'encadrure de la porte se tenait, immense, menaçant, le Comte de Fersen. Le voyage avait été long, et il avait eu beaucoup de temps pour penser à ce qui était arrivé. Son agacement avait cru de minute en minute. Il ne pouvait tolérer pareil affront. Devoir partir ainsi à la poursuite de sa femme ! Il se doutait qu'à Stockholm tout le monde était au courant et se riait de lui.

- Oscar... Nous rentrons.
Elle n'avait pas encore dit un mot. Le voir l'avait paralysée. Elle ne répondit pas. André s'en chargea.
- Non, il n'en est pas question, Oscar ne vous suivra plus jamais ! Pas après ce que vous avez fait.
Fersen se sentait incapable de se maîtriser. La fatigue du voyage et cette stupide poursuite l'avait rendu fou de rage. Il fit pourtant preuve d'une grande douceur dans ses gestes pour prendre délicatement son fils dans ses bras.
- Vous ne souhaitez plus vivre auprès de votre époux, Madame, fort bien. Restez donc où vous le voudrez. Je dirai que vous avez eu un accident alors que vous étiez retournée sur votre terre natale. Vous aviez le mal du pays, aussi êtes-vous partie à l'improviste. Lorsque je vous ai rejoint, il était trop tard.
Oscar hurla. Elle ne voulait pas qu'on la sépare de son enfant. Il le savait parfaitement. D'un geste vif, il saisit Oscar par le bras et la poussa hors de la maison.
- Ma proposition ne vous convient donc pas ? Vous ne voulez pas quitter notre fils, n'est-ce pas ? Vous voilà contrainte de me suivre ! Je suis votre mari, que cela vous plaise ou non, et vous m'obéirez !

Tout se passa très vite. Comme Fersen tentait avec beaucoup de difficulté d'emmener Oscar de force tout en tenant son fils, André s'était doucement approché. Il voulait l'assommer. Fersen fut plus rapide. Il lâcha Oscar pour sortir un pistolet. André recula un instant, il put poser l'enfant à terre. André revint à la charge. les deux hommes se battirent, tandis qu'Oscar apercevait Rosalie au bout du chemin. Oscar n'aurait rien pu faire. Tenter d'assommer Fersen aurait pu la conduire à assommer André tant ils roulaient dans la poussière devant la maison.

Un coup de feu partit. Un accident... Mais un coup de feu mortel. Oscar vit avec horreur qu'André avait été touché. Le monde s'arrêta. Oscar se jetta auprès d'André qui était déjà mort. Fersen se tenait immobile, hébété. Il avait lâché le pistolet. Oscar pleurait. Rosalie arrivait en courant. Ses yeux s'aggrandirent d'horreur. Elle bouscula Fersen pour s'agenouiller à son tour près du corps sans vie d'André. Fersen était toujours pétrifié.
- Je...n'ai...pas...voulu...cela...
Rosalie se jeta sur le pistolet. Elle le pointait sur le Comte. Elle appuya sur la détente. Le pistolet était à coup unique. Elle le lâcha. Il ne lui était d'aucune utilité.

Fersen entendit son fils pleurer. Cela le ramena à la réalité. Il devait partir au plus vite. Il avait tué un homme. Il n'avait pas fait tout ce voyage pour être arrêté. Il s'attendait à ce que Rosalie se jette sur lui pour le rouer de coups, mais elle ne le fit pas. Elle pleurait André. Il s'attendait à ce qu'Oscar le fasse, mais elle était dans un état second. Oscar venait de perdre pied... Elle venait de sombrer dans le monde du rêve... Elle ne lui opposa aucune résistance lorsqu'il la conduisit jusqu'au carosse qu'il avait lui-même conduit jusqu'ici, soucieux de récupérer Oscar dans la discrétion. C'était réussi. Elle monta dans le carosse avec son fils, les yeux dans le vague, gagnée par la folie, une folie muette dont elle ne devait plus sortir. Fersen monta sur le siège du cocher et fouetta les chevaux.

Il entendit Rosalie le maudire. Elle lui jura qu'elle le tuerait un jour, même si pour cela il lui faudrait le suivre jusqu'en Suède à coups de pierre. Elle le tuerait un jour ou l'autre, elle lui en faisait la promesse...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyVen 23 Déc - 22:59

Chapitre XVIII


Bien des années passèrent. Fersen était parvenu à quitter la France sans aucunes difficultés. Il avait dit à son père qu'Oscar avait eu un accident. Qu'elle ne retrouverait peut-être plus jamais la parole et la raison. Il s'était retiré à Steninge Slott où elle passait désormais toutes ses journées et toutes ses nuits dans sa chambre, retirée du monde. Seule une garde-malade pouvait l'approcher pour ouvrir chaque matin les rideaux, pour qu'elle ne reste pas dans le noir comme dans une nuit perpétuelle... Fersen la visitait tous les jours... Elle ne s'en rendait même pas compte.

La conscience de Fersen le torturait. La mort d'André, avoir détruit Oscar... Il ne cessait de se souvenir de ces jours bénis qu'ils avaient partagé tous ensemble... Par sa faute, tout était brisé à jamais... Il savait que Rosalie finirait par tenir sa promesse et le tuerait. Il attendait ce jour, ce jour où elle vengerait la mort d'André.

Il apprit qu'une révolution avait éclaté en France. Il s'y rendit au mépris du danger. Il revit la Reine. Il était fermement décidé à tout faire pour lui venir en aide, la sauver comme pour racheter ses fautes, cette mort dont il était responsable, quelques années plus tôt, sur cette terre de France, cette folie qui emportait Oscar... Lorsqu'il apercevait des révolutionnaires, il croyait toujours voir Rosalie parmi eux. Lorsque les femmes envahirent Versailles, il crut la voir, le menaçant d'une pique ensanglantée, criant qu'elle le tuerait, même à coups de pierre s'il le fallait.

Puis la Reine était morte. Il était anéanti. Toutes ces années où il s'était battu pour elle étaient finies, sa vie n'avait plus guère de sens. Mais il refusait de s'arrêter là. Oh non, il prit le parti de se ressaisir. Il avait un fils, une soeur qu'il aimait profondement, et il devait attendre le jour où Rosalie viendrait accomplir sa vengeance... Il devait accomplir son destin...

Oscar s'était terrée dans sa chambre à Steninge. Elle n'en sortait plus. Ses yeux étaient en permanence perdus dans le lointain. Elle avait perdu l'usage de la parole. L'atmosphère sinistre de la demeure avait ainsi conduit la gouvernante du petit Axel, qui allait bientôt fêter ses dix ans, à donner sa démission. Fersen se vit contraint d'engager une autre gouvernante et il s'en plaignit à Sofia. Ayant l'habitude, elle lui promit de lui envoyer la fille de l'une de ses servantes. Elle vint elle-même la lui présenter. Depuis la mort de leur père l'année précédente, Sofia vivait plus ou moins auprès de son frère. Et elle espérait que la douce jeune fille lui redonnerait le goût de vivre...

Fersen avait décidé d'écourter la présentation. Il faisait confiance à sa soeur, il engagerait la jeune fille. Il la recevrait, puis il partirait à la chasse. Lorsque Sofia la fit entrer, il portait donc une tenue de chasse, des cuissardes et une cravache. Il impressionna fortement la jeune fille qui répondait au doux nom de Rosetta Sten. Mais elle ne fuit pas. Elle avait cru pénétrer dans le château de Barbe-Bleue, mais elle faisait aveuglement confiance à Sofia qui était si gentille pour elle. De plus, elle savait que la Comtesse était folle et s'enfermait dans sa chambre, sans doute cela expliquait-il l'étrangeté du Comte... D'ailleurs, celui-ci lui avait sévèrement défendu d'approcher des appartements de la Comtesse. Celle-ci se montrait aggressive, parfois, avec les inconnus...

Il ne put s'empêcher de la suivre des yeux lorsque Sofia la conduisit jusqu'à sa chambre afin qu'elle y dépose sa valise. Il y avait un bouquet de roses dans le petit salon où Fersen l'avait reçu. Il s'empara d'une fleur et en broya les pétales entre ses mains...
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyJeu 29 Déc - 21:51

Chapitre XIX


Rosetta commençait à se sentir mal à l'aise dans cette demeure sinistre depuis le départ de Sofia. Elle était habituée à sa présence et voilà qu'elle la laissait seule avec son frère, ce frère si étrange. Oh, elle n'était pas vraiment seule avec lui. La demeure regorgeait de domestiques. Et il y avait la Comtesse Oscar. Elle était folle, disait-on. Folle depuis un séjour qu'elle avait fait en France huit ou neuf ans auparavant. Elle avait eu le mal du pays, c'était ce que l'on racontait à l'office. Elle avait voulu revoir sa terre natale. Le Comte l'avait suivi. Elle avait eu un tragique accident et son cerveau avait été endommagé. Depuis lors, elle vivait recluse dans sa chambre, les yeux vides. Il lui arrivait cependant d'attaquer les personnes qu'elle ne connaissait pas. Aux dires du Monsieur. Elle ne faisait confiance qu'à sa garde-malade.

Le Comte von Fersen avait donné à Rosetta Sten le titre de gouvernante, mais c'était un bien grand mot. Le petit Axel, adorable enfant, avait dix ans et les leçons d'un précepteur occupaient déjà la plupart de son temps. Rosetta accomplissait des tâches de femme de chambre pour le petit garçon, mais elle jouait aussi avec lui. Axel l'aimait beaucoup. La jeune fille, de son côté, sentait bien qu'il recherchait l'affection d'une mère. La Comtesse avait sombré dans la folie alors qu'il était si petit... Il ne devait pas se souvenir d'elle. c'était bien triste. Lorsque Rosetta avait rencontré l'enfant pour la première fois, il l'avait fixé de se beaux yeux tristes : "Mère est très malade, vous savez" avait-il dit. Cela l'avait fort attristée.

Cette Comtesse folle intrigait de plus en plus Rosetta. La jeune fille avait toujours été terriblement curieuse. Elle n'y pouvait rien, elle savait que c'était une bien vilaine chose, mais elle ne pouvait s'en empêcher. Et plus elle pensait à la Comtesse, plus elle avait envie de la voir. Elle ne savait pas pourquoi. Quelque chose l'y poussait. Pourtant, le jour même de son arrivée, Le Comte von Fersen lui avait sévérement défendu de s'approcher de ses appartements, faute de quoi il la fouetterait lui-même. Et il avait appuyé ses menaces en agitant la cravache qu'il tenait à la main. Rosetta avait souvent fait des bêtises, mais jamais Sofia ne l'avait giflée. Savoir que son nouveau maître était un adepte des châtiments corporaux la terrorisait. Mais sa curiosité fut la plus forte.

Rosetta avait épié les aller-venues de la garde-malade. Elle savait quand elle pouvait se glisser dans les appartements de la Comtesse. Pourvu qu'ils ne soient pas fermés à
clef ! Fort heureusement, ils ne l'étaient pas, et elle put entrer. Le jour pénétrait à travers les rideaux et éclairait doucement la chambre. Elle vit alors une femme blonde dans le lit. Elle avait certainement été très belle, mais sa pauvre figure émaciée semblait figée et livide. Rosetta était impressionée. Elle se repprocha aussitôt sa conduite. La Comtesse n'était pas un spectacle. Elle avait encore une dignité, elle avait le droit d'être respectée. La jeune fille fit un pas en direction de la porte pour sortir, mais...

... elle fut arrêtée par un cri formidable. Oscar la fixait intensement, la forçant à baisser les yeux, apeurée. Puis avant qu'elle puisse faire un seul geste pour quitter la chambre, la Comtesse avait bondi de son lit et entraîné à terre la malheureuse. Oscar avait vu Rosetta entrer. Elle n'imaginait que trop bien quel rôle devait remplir cette petite soubrette si jolie aurpès du Comte. Du fond de son esprit torturé, elle imagina même qu'elle venait la tuer pour pouvoir se faire épouser de son seigneur et maître. Oscar poussait des hurlements démentiels tout en la frappant. Rosetta pleurait, criait, se débattait. La Comtesse avait une force peu commune. Elle étouffait. Mais Oscar, en se redressant pour se saisir d'un objet quelconque à briser sur la tête de la jeune fille, eut une attaque cardiovasculaire. Elle était morte.

Rosetta n'eut pas le temps de penser à ce qu'il fallait faire. Le Comte von Fersen se tenait juste derrière elle. Elle poussa un petit cri. La cravache... Il allait la battre. Mais la Comtesse semblait morte. Seigneur, elle était perdue, qu'allait-il lui faire ? S'il ne la tuait pas de ses mains, il la ferait pendre. Ses sanglots redoublèrent.
- Rosetta, vous voilà, petite curieuse... Vous m'avez désobéi...
La voix de Hans était très calme. Il s'était agenouillé auprès du corps d'Oscar. Il lui ferma les yeux.
- La Comtesse est morte, dit-il sans trop d'émotion.
Rosetta tremblait comme une feuillle. Il s'en aperçut.
- Vous mériteriez que je vous fouette jusqu'au sang, mais je ne vous infligerai aucune punition, pour cette fois.
- Monsieur...
- La Comtesse est mieux là où elle est à présent. Elle ne souffre plus, maintenant. C'est bien mieux ainsi. Toutes ces années... Comprenez-vous, Rosetta ?
Elle acquiesa.
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Rosetta von Fersen
Coeur tendre
Coeur tendre
Rosetta von Fersen


Nombre de messages : 111
Date d'inscription : 07/11/2005

Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains EmptyLun 2 Jan - 12:03

Chapitre XX


La mort brutale de la Comtesse avait profondement choquée Rosetta. Peut-être plus encore que son agression. L'attitude du Comte l'avait glacée. Elle aurait presque préféré qu'il la punisse tant son nouveau comportement l'effrayait dans ce qu'il avait d'étrange et d'inquiétant. Rosetta aurait pu demander ses gages et quitter le château. Mais Madame Sofia ne voudrait peut-être plus d'elle. Que deviendrait-elle, alors ? Elle devait rester, même si elle sentait peu à peu monter une atmosphère malsaine sous les hauts plafonds et les parquets soigneusement cirés.

Pour n'y plus penser, Rosetta redoublait d'attention envers le petit Axel. Cet enfant lui faisait de la peine. "Père dit que mère est au Paradis, à présent", lui dit-il. Mais sa petite voix mélancolique donna à la jeune fille l'envie de pleurer, d'autant plus lorsqu'il ajouta "Vous resterez auprès de moi et ne me quitterez pas, n'est-ce pas ? Vous êtes si jolie et si gentille." Elle avait promis. Mais au fond d'elle-même, elle avait la curieuse impression que jamais elle ne pourrait tenir cette promesse, que des événements hors de sa volonté l'arracheraient bientôt à cet enfant solitaire auquel elle s'était attachée.

Quelques semaines à peine après la mort d'Oscar, le Comte fit appeler Rosetta dans son bureau. Craintive, elle se demandait qu'elle sottise avait-elle bien pu faire. Monsieur rit en la voyant entrer, pénaude, les yeux baissés.
- Allons, Rosetta, quel est cet air appeuré ? Auriez-vous des raisons de croire que je veuille vous gronder ?
Elle fit non de la tête.
- Vous aurait-on arracher votre langue ?
- Non, Monsieur, pardonnez-moi.
Fersen se leva et prit un trousseau de clefs sur une petite table. Comme il s'approchait d'elle, la jeune fille remarqua les roses sur le bureau. Deux corolles avaient été arrachées et gisaient près du vase. L'une d'elle avait été brutalement broyée, ses pétales déchirés étaient éparpillés sur le bureau. La seconde était encore intacte, mais sembalit attendre de subir le même sort. Rosetta eut un frisson, cette mise en scène lui déplaisait.
- Rosetta, je veux vous confier les clefs de mes appartements. Tenez, et gardez-les.
Surprise, elle considera le trousseau qu'il avait déposé entre ses mains. Elle remarqua immédiatement une clef plus petite que les autres. A vrai dire, minuscule.
- Cette petite clef qui semble vous intriguer ouvre mon secrétaire. Le secrétaire que voici, ajouta-t-il en désignant l'élégant petit meuble.
Pourquoi lui donnait-il ces détails ?
- Je vous interdit de vous en approcher, Rosetta, comprenez-vous ? Si jamais vous l'ouvrez ma colère sera sans limite.
Tout en parlant, d'une voix devenue lourde de menaces, il continuit de montrer le secrétaire, comme s'il voulait que la jeune fille ne l'oublie pas. Il insistait. Il la tentait. Une jeune fille curieuse comme l'était Rosetta ne pouvait qu'être obsédée par le secrétaire après cela...

Rosetta résista à la curiosité deux semaines durant. Certes, elle, n'avait pas oublié l'existence du secrétaire, et la petite clef était là en permanence pour le rappeler à son bon souvenir. Que pouvait-il donc contenir ? Quels papiers mystérieux renfermait-il ? La jeune fille auarit dû admettre qu'il s'agissait sans doute de papiers bien ordinaires, mais que le Comte ne souhaitait pas divulguer. Un journal, peut-être. Elle aurait dû comprendre que cela n'était que bien normal. Elle savait que cela ne se faisait pas de fouiller les affaires d'autrui. Elle savait qu'à plus forte raison une soubrette ne devait pas se mêler des affaires de son maître.Elle savait qu'elle serait très sévèrement punie si elle le faisait. Et que lui apporterait une telle mauvaise action ? Rosetta n'était pas une voleuse, elle n'espérait pas trouver quelque objet de valeur dont elle put tirer profit. Sa curiosité serait satisfaite, mais après ?

Mais Rosetta n'y tint plus. En début d'après-midi, tandis que tout le château était plongé dans un profond silence, elle se rendit dans le bureau sur la pointe des pieds. Les domestiques se reposaient. Axel était à la salle d'étude avec son précepteur. Par la fenêtre, elle venait d'apercevoir le Comte partant à la chasse. Elle entra dans le bureau. La jeune fille était enhardie par son expérience précédente. Le Comte ne l'avait pas punie alors qu'il le lui promettait si elle lui désobéissant. Pourtant, la Comtesse avait trouvé la mort... Mais Rosetta avait peur d'admettre que c'était pour cette raison qu'il l'avait grâciée. Cependant, dans ce bureau, nulle folle pour donner l'alerte, personne ne crierait. Le secrétaire ne dirait rien. Et elle s'était assurée que personne ne puisse la surprendre. Elle ouvrit le secrétaire avec d'infinies précautions. Il ne fallait pas que le battant claque. Sa main avait légèrement tremblé au moment d'insérer la clef dans la serrure ouvragée, mais elle tenait bon.

Elle découvrit plusieurs volumes reliés de ce qui semblait un journal. Un journal bien épais. Sans doute les mémoires du Comte. Rosetta savait lire, Madame Sofia le lui avait appris, mais jamais elle ne pourrait lire ces miliers de feuillets. Elle était un peu déçue. Ce journal devait contenir de bien piquantes anecdotes. Désapointée, elle prit un volume et en fit rapidement tourner les pages pour admirer la fine écriture du Comte. C'était écrit en Français. Mais Rosetta le comprenait, car Madame Sofia le lui avait également appris. Elle s'était pris d'affection pour Rosetta et recherchait souvent sa compagnie, ce fut pourquoi elle avait voulu qu'elle puisse parler français avec elle. Sofia s'était séparée de Rosetta parce qu'elle pensait réconforter ainsi son frère bien-aimé, mais elle n'avait pas obtenu satisfaction.

Rosetta parcourut un à un les volumes du journal, sans rien en lire. De l'un d'eux, quelques feuillets libres s'échappèrent et tombèrent à ses pieds. Elle posa la volume, se baissa pour les ramasser, lorsqu'un détail attira soudain son attention. Les roses... Les roses sur le bureau... Il y avait toujours la rose meurtrie qu'elle avait vu lorsque le Comte lui avait confiée les clefs. Elle avait séchée, tandis que les roses du vase avaient été changées. Mais la seconde corolle détachée de l'ancien bouquet, séchée, elle aussi, était également là. Cette fois, ses pétales avaient été arrachés... Elle voulut remettre les feuillets à leur place. Elle remarqua alors que les premières lignes avaient été brutalement raturées. Sa curiosité fut la plus forte, elle commença à lire.

Les mots couchés sur le papier couraient de ses mains fébriles à son esprit horrifié. Le Comte décrivait les circonstances dans lesquelles la Comtesse avait perdu la raison. Il avait tué un homme. Un certain André qui semblait avoir été son ami. Rosetta aurait voulu pleurer mais elle n'y parvint pas. Elle venait de comprendre qu'elle avait connaissance d'un terrible secret.

La porte s'ouvrit avec violence. Dans un cri, elle lâcha les feuillets. Le Comte, immense, se tenait devant elle, vêtu comme le jour où il l'avait engagée. En tenue de chasse, sa redoutable cravache à la main. Ses yeux brillaient d'une façon atroce.
- Rosetta !! Vous m'avez une fois de plus désobéie !
D'un regard, il comprit qu'elle avait mis la main sur les feuillets.
- Comme la vie est étrange, Rosetta. J'avais confié mes pensées à ce journal avec l'intention de détruire ces passages. J'avais arraché les feuillets, commencé à les râturer, et décidé de les brûler. Il est bien dommage que vous les ayez lu. Je sais que vous comprenez, je sais que Sofia vous a éduquée. Vous avez compris tous les mots.
D'un geste vif, il la saisit et la jeta à terre, à coups de cravache. Les cris de la malheureuse jeune fille lui firent craindre que des domestiques ne viennent aux nouvelles, aussi lui enfonça-t-il un mouchoir dans la bouche.
- Vous comprenez bien que je ne puis vous laisser vivre après ce que vous venez de voir.
Le Comte l'immobilisait en appuyant son genou sur sa poitrine. Les yeux révulsés d'horreur, Rosetta se débattait en vain. Sa peau la brûlait où la cravache s'était abatue.
- Ma soeur va vous regretter, Rosetta, vous lui étiez très chère. Elle sera bien triste quand elle saura que vous avez trébuché sottement dans l'étang... Et je vous regretterai aussi, rassurez-vous. J'avais de grands projets pour vous. Mon fils vous adore. Je pensais que d'ici cinq ans, lorsqu'il aurait eu quinze ans, vous auriez fait de lui un homme. Bien entendu, je vous aurais montré ce que j'attendais de vous.
Elle pleurait. Dans quel cauchemar se trouvait-elle ? Le Comte enserrait sa gorge. Elle souffrait du manque d'oxygène. Il lui faisait si mal... Elle lut la folie dans ses beaux yeux. Il serrait, serrait, serrait toujours... Il l'étranglait et ensuite il irait jeter son corps dans l'étang. A la nuit tombée, sans doute. Le Comte accentua la pression de ses mains sur le cou de la malheureuse. Lorsqu'il la lâcha, Rosetta gisait, inerte.



FIN.
Revenir en haut Aller en bas
http://103736.aceboard.fr/index.php?login=103736
Contenu sponsorisé





Comme une rose broyée entre ses mains Empty
MessageSujet: Re: Comme une rose broyée entre ses mains   Comme une rose broyée entre ses mains Empty

Revenir en haut Aller en bas
 
Comme une rose broyée entre ses mains
Revenir en haut 
Page 1 sur 1
 Sujets similaires
-
» Comme une rose en imposture

Permission de ce forum:Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
Balades Romantiques :: Versailles No Bara :: Fanfics-
Sauter vers:  
Ne ratez plus aucun deal !
Abonnez-vous pour recevoir par notification une sélection des meilleurs deals chaque jour.
IgnorerAutoriser